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mardi, 05 novembre 2019

Pourra-t-on encore longtemps parler de trêve en Syrie ?

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Pourra-t-on encore longtemps parler de trêve en Syrie?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

La Turquie a déclenché le 9 octobre une offensive dans le nord-est de la Syrie contre la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG), un groupe qu'elle qualifie de  terroriste  mais qui est soutenu par les pays occidentaux en raison de sa lutte active contre les combattants de l'organisation État islamique présents en Syrie.

La raison alléguée par Ankara en était sa volonté d'empêcher des milices kurdes extérieures à la Turquie de rejoindre des Kurdes ayant toujours vécu dans l'Est de la Turquie afin de constituer l'amorce d'un Etat Kurde qui priverait en ce cas la Turquie de toute souveraineté sur un bon quart de son territoire.

Pour Recep Tayyip Erdogan, cette perspective était inacceptable et devait être combattue en engageant toutes les forces militaires du pays. Même si celles-ci ne sont pas aussi efficaces qu'elles en ont la réputation au sein de l'Otan, elles sont néanmoins parfaitement capables de conquérir et occuper une large bande ou zône de sécurité tout au long de la frontière syro-turque et sans doute un peu au delà, tant du moins que les Américains alliés de la Turquie au sein de l'Otan laisseront faire.

Recep Tayyip Erdogan avait sans doute considéré que le retrait du contingent américain annoncé à grand bruit par Donald Trump lui laisserait les mains libres pour mener une offensive militaire de grande ampleur contre les Kurdes, voire pour occuper durablement une bande frontalière  de sécurité. Quant à la Russie, elle était restée à ce jour dans l'expectative, d'autant plus qu'elle ne dispose pas sur place de moyens militaires suffisants pour freiner l'offensive turque.

Or il avait semblé que Washington ne laisserait pas se poursuivre l'offensive turque contre les Kurdes des YPG. Le 17 octobre, lors d'une visite à Ankara, le vice-président américain Mike Pence avait obtenu la suspension pour 120 heures de l'offensive turque lancée le 9 octobre, afin de permettre aux forces kurdes d'abandonner leurs positions actuelles dans le projet turc de « zone de sécurité ». Ceci il est vrai ne signifie pas avant l'arrêt définitif de cette offensive et moins encore ultérieurement le retrait des Turcs dans leurs positions antérieures.

Le 21 octobre Recep Tayyip Erdogan a prévenu qu' une grande partie des 120 heures était désormais écoulée  et que l'offensive reprendrait si les YPG ne respectaient pas l'accord.

Le commandant des Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les Kurdes, a, de son côté, accusé la Turquie de saboter l'accord de cessez-le-feu en empêchant le retrait des combattants FDS de la ville assiégée de Ras al-Aïn. Selon lui, l'accord contient un point essentiel précisant l'ouverture d'un couloir d'évacuation sous le parrainage des États-Unis. Or les  Turcs empêcheraient le retrait kurde du secteur de Ras al-Aïn. ils empêcheraient notamment la sortie des blessés et des civils. Ils continueraient d'attaquer les Kurdes.

On notera que les Kurdes, confrontés à l'absence américaine, ont demandé le soutien de Bashar al Assad, président de la Syrie et allié de la Russie. La Syrie a répondu indirectement en mettant en place des troupes dans des secteurs proches de la frontière turque, notamment de Kobané et Minbej. Ceci se ferait avec l'assentiment des Russes.

On pourrait penser au soir du 21 octobre que Moscou ne souhaiterait pas la mise en place définitive au nord de la Syrie d'une bande de sécurité dominée par les Turcs. Reste à savoir si Erdogan se laissera arrêter, car il semble pour le moment tenir toutes les cartes en mains.

Notes

1) La carte n'est pas à jour concernant les différentes zones d'occupation. Nous la publions pour donner une image générale de la région

2) Le lecteur pourra relire l'analyse du général Delawarde en date du 14 octobre 2019 analysant  l'offensive turque en Syrie et publiée sur ce site. Pour l'essentiel, elle demeure d'actualité.
http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=3915...

3) On consultera sur ce sujet un article détaillé de E. J. Magnier qui vient de nous parvenir
https://ejmagnier.com/2019/10/21/rencontre-poutine-erdoga...

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A la date du 22/10 à 22h, on peut lire dans la presse du soir

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a fait état, mardi 22 octobre, d'un « accord historique » sur la Syrie conclu lors d'une réunion avec son homologue russe Vladimir Poutine à Sotchi, en Russie.
 « Aujourd'hui, avec M. Poutine, nous avons conclu un accord historique pour la lutte contre le terrorisme, l'intégrité territoriale et l'unité politique de la Syrie ainsi que pour le retour des réfugiés », a déclaré Recep Tayyip Erdogan lors d'une conférence de presse.
Selon Recep Tayyip Erdogan, l'accord conclu avec Vlaidmir Poutine, allié du régime de Damas, porte surtout sur les secteurs du nord-est de la Syrie dans lesquels les forces kurdes du YPG sont présentes mais où l'offensive turque n'avait pas été étendue avant sa suspension.

Nous y reviendrons sans doute

lundi, 04 novembre 2019

Comment la Chine efface les Américains

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Comment la Chine efface les Américains

Les Carnets de Nicolas Bonnal

L’Amérique ? C’est devenu depuis les années soixante un mixte d’impérialisme facho-nihiliste, d’oligarchie tiers-mondiste et de fascisme antiraciste-féministe. Mais cela ne mène plus très loin. America, gratte again…

La Chine s’est éveillée et, pauvre Napoléon, le monde ne tremble pas. Le monde sortira des guerres impériales/humanitaires (les idées chrétiennes devenues folles de Chesterton) et autre croisades occidentales/accidentelles. Mais voyons des analyses US plus précises…

J’ai demandé à Hervé de traduire un texte Unz.org de l’universitaire Roberts Godfree sur la déculottée US dans tous les domaines (ce n’est pas que l’Europe vaille mieux, on est tous d’accord). Aucune schadenfreude : ce qui m’affole c’est que notre occident anesthésié ne se rend compte de rien ou s’en sort par des boniments paternalistes ou des clichés racistes.

Et cela donne : 

« En 2003, j’ai publié un livre sur le déclin des trente-six indicateurs sociaux et économiques de l’Amérique. J’en ai envoyé des copies par la poste à l’Administration, au Congrès et aux chefs de département et j’ai reçu une réponse du Directeur général de la Central Intelligence Agency, qui m’a dit que l’Agence fournissait des informations presque identiques au gouvernement depuis plusieurs décennies. Pendant ce temps, notre déclin et la montée en puissance de la Chine se sont accélérés et cet élan nous a menés si loin, si rapidement, que toute compétition est devenue irréaliste. »

Roberts remet alors des pendules à l’heure :

« Si la Chine ressemblait à la caricature que nos médias nous présentent depuis ces sept dernières décennies, alors oui, nous devrions contrebalancer son autoritarisme excessif, répressif et autoritaire et investir notre trésor dans les technologies de pointe pour faire en sorte que nous fassions l’envie du monde….Mais que faire si la Chine n’est ni répressive, ni autoritaire ? Et s’il ne nous reste plus de trésor à investir ? Et si les dirigeants chinois étaient plus populaires, respectés et compétents que les nôtres ? Que se passerait-il si son économie était déjà 30 % plus forte que la nôtre, connaissait une croissance trois fois plus rapide, avec deux tiers de fardeau de la dette en moins ? Et si elle était déjà en avance sur nous sur le plan scientifique et technologique, imprenable sur le plan militaire, et si elle possédait des alliés plus nombreux et plus puissants que les nôtres ? »

On rappelle que les chinois/confucéens sont contents :

« Gouvernement : Confucius, le politologue suprême disait : « Si les gens n’ont pas confiance en leurs dirigeants, l’État ne peut pas exister. » La confiance en notre gouvernement est à son plus bas niveau de l’histoire. Gallup affirme  que la plupart d’entre nous considèrent le gouvernement comme notre problème le plus urgent et que seuls 54 % d’entre nous « exprimons constamment une position pro-démocratique ». Le système de gouvernement professionnel et non confessionnel de la Chine l’a ramené à son rôle d’Empire du milieu. Comparé au nôtre, le gouvernement chinois est tourné vers l’avenir, décentralisé, efficace et économe. L’Examen d’admission au gouvernement sélectionne chaque année les 2 % des meilleurs diplômés et la réussite est la seule voie vers le pouvoir et la responsabilité. Les 200 membres du Conseil d’État – tous promus pour leur capacité à travailler en coopération – ont gouverné collectivement des milliards de personnes pendant 5 000 ans et leurs données publiques sont stupéfiantes. La plupart ont un doctorat et un QI supérieur à 140. Tous ont commencé leur carrière dans les villages les plus pauvres du pays et n’en sont partis qu’après avoir augmenté les revenus du village de 50%. Ils ont répété cette performance à tous les niveaux, y compris à la présidence, comme le fait Xi. »

Roberts rappelle que le vaurien Donald a parfois raison décidément dans sa discordance cognitive :

« Nous choisissons les dirigeants par acclamation – une coutume gréco-romaine qui favorise les vauriens qui savent parler – et c’est exactement ce que nous avons alors que, comme l’a  fait remarquer  le président Trump, « les dirigeants chinois sont beaucoup plus intelligents que nous. C’est comme prendre les New England Patriots et Tom Brady et les faire jouer contre ton équipe de football du lycée. »

Et Roberts d’ajouter :

« Aujourd’hui, la Chine génère 20 % du PIB mondial par rapport à nos 15 %, ses importations et ses exportations sont équilibrées, ses relations commerciales sont excellentes, sa monnaie est assez valorisée, son économie est 30 % plus importante et croît trois fois plus vite, ses salaires dans le secteur manufacturier sont à égalité avec les nôtres et ses plans pour 2025 sont à couper le souffle. Toujours de nouvelles autoroutes, voies ferrées, métros et ports et, l’année prochaine, l’Internet le plus rapide et le plus avancé avec des villes entières construites autour de la 5G. »

Soutien du monde émergent, la Chine n’est même pas impopulaire et elle manage sans menace une bonne partie du monde :

« En 2018, le taux d’approbation mondial de 34 % de la Chine battait celui de l’Amérique, qui était de 31 %... Nous avons cédé le contrôle de la Crimée et de la mer Noire à la Russie et, de plus en plus, du Moyen-Orient. Avec la Nouvelle route de la soie, la Chine et la Russie fusionnent l’Union économique eurasienne (Arménie, Bélarus, Kazakhstan, Kazakhstan, République kirghize et Russie avec le Tadjikistan, l’Ouzbékistan et la Moldavie en considération) ; l’Organisation coopérative de Shanghai, OCS (Russie, Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Inde, Chine, Pakistan ; avec l’Afghanistan, l’Iran, la Mongolie et la Biélorussie comme observateurs et l’Arménie, l’Azerbaïdjan, le Cambodge, le Népal, le Népal, Sri Lanka et la Turquie comme partenaires de dialogue) ; et le Partenariat économique régional global, (Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Myanmar, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam, Chine, Japon, Inde, Corée du Sud, Australie et Nouvelle-Zélande). Une fois que les gazoducs Nord Stream II et South Stream seront achevés en décembre, comment l’UE pourra-t-elle résister à s’y brancher ? »

Voyons la Science et le QI chinois :

« Leurs cinq points de QI supplémentaires par rapport à nous signifient qu’ils ont 300 000 personnes avec un QI de 160, comparativement à 30 000 en Occident. La Chine a dépassé les États-Unis pour devenir le premier producteur mondial d’articles scientifiques, représentant près d’un cinquième de la production mondiale totale, selon un  nouveau rapport. La Chine  domine le classement mondial  des articles de recherche les plus cités publiés dans les 30 domaines technologiques les plus en vogue. Bien que les États-Unis aient produit 3,9 millions d’articles sur la recherche en tous domaines, comparativement à 2,9 millions en provenance de la Chine, cette dernière a produit la plus grande part dans 23 des 30 domaines qui ont suscité le plus d’intérêt, tandis que l’Amérique a obtenu la tête pour les sept autres.

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Puis la Technologie : « Les deux tiers des ordinateurs les plus rapides au monde sont chinois, mais rien ne révèle plus le vide de notre armoire technologique que la domination chinoise du haut débit mobile amélioré. Nous prendrons deux fois plus de temps et dépenserons deux fois plus pour intégrer un système moins abordable, fonctionnel, compatible et évolutif. Pourtant, nos impitoyables médias ont tourné en dérision le président Trump lorsqu’il a appelé l’Amérique à dominer la 6G, malgré le fait publiquement connu que Huawei a 600 mathématiciens, physiciens et ingénieurs travaillant sur le 6G depuis plus d’un an. La Chine est en tête du classement mondial dans la plupart des dix principaux domaines « prometteurs » comme la recherche sur les piles et représente plus de 70 % de tous les articles sur les photocatalyseurs et le traitement du cancer ciblé par l’acide nucléique, qui se classent respectivement en 12e et 14e position. Les États-Unis sont en tête dans trois domaines de la biotechnologie, dont l’édition du génome en 7eme position, et l’immunothérapie en 10eme. La Chine est le chef de file mondial de  la recherche fondamentale  et de la plupart des technologies, en particulier celles concernant les  régions chaudes. »

L’Aérospatiale ? 

« La Chine a lancé plus de missions spatiales en 2018 que la Russie ou l’Amérique et son premier avion de ligne local décollera cette année, bien que la FAA ait trainé les pieds. C’est le premier fournisseur mondial de drones et le plus grand fabricant et exportateur d’avions de combat légers. Maintenant que son avion de combat, le WS-15, est en production, son J-20 va dépasser les nôtres. »

Ironiquement, l’auteur ajoute sur cette guerre commerciale aux dimensions modestes :

« Comme le dit Parag Khanna, Pékin doit se demander pourquoi le numéro 3 lancerait une guerre commerciale contre le numéro 1. Bien que nous soyons autosuffisants à bien des égards, nous sommes peut-être moins indispensables que nous ne l’imaginons. «L’Amérique d’abord» sonne bien, sauf quand cela signifie en fait « l’Amérique seule ».

Indicateurs sociaux ?

« Le GINI chinois, qui n’avait jamais atteint nos niveaux, est en train de chuter comme une pierre et l’extrême pauvreté disparaîtra l’année prochaine, lorsque tous les Chinois auront une maison, un emploi, beaucoup de nourriture, une éducation, des rues sûres, des soins de santé et de vieillesse (il y aura alors plus de toxicomanes, de suicides et d’exécutions, plus de personnes sans abri, pauvres, affamées et prisonnières en Amérique qu’en Chine). 500 000 000 de Chinois vivant en milieu urbain auront une valeur nette et un revenu disponible supérieurs à ceux des Américains moyens, leurs mères et leurs nourrissons seront moins susceptibles de mourir en couches, leurs enfants obtiendront leur diplôme d’études secondaires trois ans plus tôt que nos enfants ; et survivront. 98 % des Chinois listés comme « pauvres » sont déjà propriétaires de leur maison et Xi a programmé de ramener le coefficient GINI au-dessous de celui de la Finlande, d’ici 2021-2035. »

L’éducation est incomparable reflétant celle des quatre dragons qui nous impressionnaient tant au cours des lointaines années 80 : 

« Aucun pays n’a autant d’ingénieurs intelligents, bien formés et dévoués. Un quart des travailleurs en Science, Technologie et Mathématiques dans le monde sont des Chinois, une main-d’œuvre intellectuelle huit fois plus nombreuse, qui croît six fois plus vite et qui obtient son diplôme d’études secondaires trois ans plus tôt que chez nous. D’ici 2025, la Chine comptera plus de travailleurs qualifiés sur le plan technologique que l’ensemble des pays de l’OCDE – États-Unis, UE, Canada, Mexique, Australie, Israël, Japon, Corée, Nouvelle-Zélande et Turquie – réunis. »

Pierre d’achoppement, la sécurité, la fierté nationale :

« Faible criminalité, pas d’absurdités religieuses ou de violence islamique. Les entreprises peuvent investir en toute sécurité sans crainte de troubles religieux, de violence ou de vol qualifié.

La foi en l’avenir, le nationalisme, la croyance en une Chine meilleure. Les Chinois croient fermement en l’avenir et sacrifient volontiers temps et efforts pour la prochaine génération. Les Chinois ont le même sentiment que celui que nous avions dans les années 60, sauf que leurs salaires et leur richesse ont doublé chaque décennie depuis soixante-dix ans. »

A l’heure où l’occident bascule dans le techno-bolchévisme, la dystopie écologiste, le transgenre et le fascisme humanitaire, la Chine est démocrate…

« La Chine est la première  démocratie  au monde. Bien que cette affirmation mette en colère de nombreux Occidentaux, quel que soit le système de mesure utilisé, la Chine est une démocratie prospère et l’Amérique ne l’est pas, que ce soit sur le plan électoral, populaire, procédural, opérationnel, financier ou technologique. »

Roberts ajoute qu’elle saura même se défendre :

« L’armée chinoise  dispose de certains des  systèmes d’armes  les plus modernes au monde pour la moitié du coût de la défense américaine. Ses missiles les plus modernes surpassent les nôtres dans toutes les catégories grâce au couplage étroit entre leurs chimistes de pointe et les fabricants de propergols pour fusées. Les systèmes d’armes russes comblent toutes leurs lacunes. »

Cerise sur le gâteau : « 95 % des chinois soutiennent les politiques de leur gouvernement et la plupart sont prêts à se battre pour leur pays. »

L’indianiste Daniélou écrivit que les aryens occidentaux étaient de simples prédateurs. Le chaos des siècles passés l’aura montré. On verra la suite avec nos chinois…

 

samedi, 02 novembre 2019

Merkel et notre destruction sur commande

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Merkel et notre destruction sur commande 

Les Carnets de Nicolas Bonnal

Il faudra bien étudier cette histoire de notre destruction sur commande depuis la fin des années 2000, depuis les années Obama. Une force conquérante (Soros, la finance, le genre, les migrants, la dette, l’austérité, le LGBTQ, le techno-fascisme, les attentats, l’écologie) n’a cessé de nous contraindre.La classe politique est partout devenue hostile, voire haineuse. La culture a été censurée, le cinéma annihilé ; le prêche humanitaire est continu. Le citoyen/résistant assiste à la destruction sans retenue cette fois de son pays et de ses libertés ; le fascisme sociétal veut destituer le président américain, fût-ce comme ça, sans le sénat… Lynchons, pendons le représentant du p’tit blanc…

En France nous aurons été servis avec le phénoménal Sarkozy (Syrie, Libye, vente d’or, réforme, trique), Lagarde (prenez garde, elle n’a pas fini de nuire), Hollande et son bébé-ministre successeur vendu au chaland comme un Bonaparte. 

Mais Merkel : ce morpion au bilan apocalyptique ne partira plus, le personnel politique ayant été là-bas comme en France anéanti. J’ai rappelé que pour l’historien américain Stanley Payne, alors que les espagnols sont anesthésiés (bouffe, télé, sport, techno-addiction), leurs députés ne sont pas élus mais choisis par leur hiérarchie, pour exécuter l’agenda d’élites qui nous mènent au néant. Elites qui d’ailleurs furent suffisamment stupides pour ne pas comprendre que cette attitude renforce Hezbollah, Iran, Chine ou bien Russie. Même le pas très futé PM israélien et ses comparses milliardaires US  vont finir par s’en rendre compte. Lisez Haaretz qui commence – un peu tard ! – à dessiller son lectorat. 

Ce délitement de la raison pratique reflète aussi l’ascension de la stupidité. L’économiste Carlo Cipolla écrivait dans son classique :

Loi 3: Une personne stupide est une personne qui crée des problèmes à une autre personne ou à un groupe de personnes sans en tirer soi-même le moindre bénéfice.

Cela définit bien nos politiciens : 10% de crapules certes, mais aussi, mais surtout 90% de stupides - ou de couards.

Pays remplacé, humilié, écrasé, mutilé, ruiné, privé de libertés, l’Allemagne de Merkel offre la meilleure dystopie de notre Europe, avec sans doute la Suède et cette poignée de Gille scandinaves qui ont toujours été à l’avant-garde du masochisme sociétal, manifestation de cette angoisse existentielle du modernedont parlait Guénon…

On va évoquer un texte allemand pour décrire l’Allemagne. Il a été traduit par nos amis suisses (lesobservateurs.ch) et souligne les points suivants :

« Si l'Allemagne était une entreprise, il y aurait un panneau accroché à l'entrée déclarant : "On ferme." Infrastructures endommagées, Internet plus lent qu'en Roumanie, écoles sales, système énergétique en panne, avenir gâché : Le pays de Merkel est en feu. »

Alors qu’elle avait hérité une machine prestigieuse, Merkel a saboté les industries allemandes. Le texte rappelle :

« Autrefois, l'Allemagne était un pays de précision, de fiabilité et de fabrication de la plus haute qualité, dont les produits sont demandés et appréciés dans le monde entier. Après quatorze ans de gouvernement Merkel, l'Allemagne n'est pas seulement un champ de ruines sur le plan économique. Et la prochaine crise frappe déjà à la porte. »

La récession est revenue :

« La récession bat déjà son plein. Et cette fois, les choses ne se passeront pas aussi bien qu'il y a dix ans, pendant la crise financière mondiale. Car à présent, le noyau industriel souffre. Audi, BASF et Bayer, Thyssen-Krupp, Siemens et SAP annoncent des licenciements et des suppressions d'emplois. »

Merkel détruit avec sa coalition écologiste son industrie et écrase le pays d’impôts (53 milliards d’euros pour sauver le climat en éliminant les humains) :

« Et il ne s'agit que des grands noms. D'autres grands constructeurs automobiles sont également en difficulté, aux prises avec des pertes, des problèmes massifs de ventes et des restructurations. Les entreprises de taille moyenne et les leaders du marché sont également sous pression depuis longtemps - des noms brillants comme Krone, WMF ou Vorwerk. »

Tout s’écroule :

« Dans le sillage des grands acteurs, les petits et moyens sous-traitants tombent également dans le piège. Si une petite entreprise de Basse-Bavière ou de Lusace doit fermer ses portes, ce n'est peut-être pas une grande nouvelle nationale. Mais pour la région touchée, quelques centaines d'emplois perdus sont aussi une catastrophe. »

Le texte ajoute que la classe moyenne se vide de son sang ; mais pourquoi toujours dire classe moyenne ? Soyons guénoniens et écrivons le peuple. Merkel c’est la femme savante (oh, Molière !), la bourgeoise gentilhommesque qui rêve d’anéantir un peuple culpabilisé, privé de sa terre et de son héritage culturel, comme nous tous en Europe. 

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« Ce ne sont pas des cas isolés. Avec les nombreuses petites et grandes faillites et autres pertes d'emplois, la structure industrielle nationale, qui était jusqu'à présent l'épine dorsale de la prospérité allemande, est en train de s'effriter. Par le biais de cette hémorragie, la crise s'installe dans les salons de la classe moyenne et de la classe ouvrière. »

On accuse Donald, le Brexit, la malchance :

« Rien de tout cela ne tombe du ciel. Des politiciens, qui veulent continuer à collecter et à redistribuer l'argent des contribuables comme s'il n'y avait pas de lendemain, insistent encore à l'envi sur Donald Trump et sa guerre commerciale avec la Chine, ou sur le "démoniaque" Boris Johnson et son adhésion au "Brexit" : Or cette crise économique est essentiellement interne. »

L’agenda nihiliste et malthusien, exterminateur même du climat se met en place :

« La "protection du climat" ruine le noyau industriel[...] Les raisons des difficultés rencontrées par le principal équipementier automobile Continental sont déterminées par l'abaissement des limites d'émissions de gaz d'échappement et de CO2 pour les voitures à moteur à combustion interne et le passage forcé aux voitures électriques, ce que les politiciens veulent, mais pas les acheteurs de voitures. [...] »

L’hystérie climatique gangrène les cervelles et mène notre colonelle à appliquer benoitement  le plan Morgenthau de 1944-45, qui prévoyait désindustrialisation et dépeuplement d’un pays alors écrasé, criminalisé, occupé:

« En période de récession, les politiciens forcent l'économie et l'industrie allemandes à s'attaquer à plusieurs projets de changement structurel important à la fois. Après la sortie du nucléaire, la sortie du charbon est également prévue. Pour les régions minières de lignite d'Allemagne de l'Ouest et de l'Est, cela signifie que même le dernier employeur industriel va migrer. »

Important, le réseau ferroviaire et routier s’écroule comme en France :

« Le réseau routier et ferroviaire est depuis longtemps devenu obsolète et inefficace. Pendant des années, les investissements nécessaires à la préservation et au développement des infrastructures de transport n’ont pas été effectués. Malgré les recettes fiscales records - durant les années Merkel, les recettes fiscales des administrations publiques ont presque doublé - il n’y a jamais eu assez d’argent. »

L’Allemagne passe pour un pays riche. Mais les Allemands sont en moyenne trois plus pauvres que les Espagnols. Avec l’afflux migrant et l’étau négatif (pardon, les taux négatifs) de Goldman-Draghi, les prix dans l’immobilier ont gentiment doublé en dix ans.

Notre locuteur :

« L'argent dilapidé aujourd'hui fera cruellement défaut lorsque, dans une ou deux décennies, les baby-boomers d'aujourd'hui prendront leur retraite et que la demande de paiements augmentera fortement. Le conte de fées du "pays riche", avec lequel chaque gouvernement fédéral a justifié la poursuite du pillage des contribuables, a depuis longtemps cessé d'être vrai : en ce qui concerne le patrimoine moyen des ménages privés, l'Allemagne est presque au bas de la liste de l'UE, et se situe même loin derrière les pays du sud, qui demandent des transferts toujours plus urgents de l'Allemagne. »

L’éducation s’écroule comme la natalité (la natalité effondrée est obligatoire, comme qui dirait nurembergeoise).Les parents conservateurs risquent la prison s’ils refusent l’éducation dégénéréeet imposée. On comprend les hésitations…

La suite :

« Le système éducatif allemand produit un grand nombre de diplômés de l'enseignement secondaire qui non seulement ne sont souvent pas apte aux études universitaires, mais ont également des difficultés avec l'allemand et les mathématiques, ainsi que des diplômés universitaires qui maîtrisent les études de genre et la pédagogie sociale, mais qui ne sont pas adaptés aux tâches complexes d'une société industrielle moderne. Parallèlement au déclin des Hautes Ecoles et des Ecoles secondaires, le nombre de spécialistes et de travailleurs qualifiés dont l'économie a un besoin urgent diminue également. »

Il faudrait importer du gastarbeiter, sauf que 95% des migrants sont inexploitables…La suite :

« Les politiciens prétendent que les travailleurs qualifiés qui font défaut seront importés. La réalité est différente : Sur les deux millions de "travailleurs qualifiés" qui sont entrés dans le pays depuis l'ouverture des frontières par Merkel, une grande partie ne trouvera jamais sa place dans le monde du travail allemand ; une proportion considérable d'entre eux est analphabète et incapable de se former. »

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L’Allemagne n’attire personne de sérieux professionnellement, car si on paie plus d’impôts, on touche moins :

« En revanche, les professionnels ont tendance à négliger les tentatives de recrutement allemandes. Qui voudrait travailler dans un pays qui offre des salaires plus bas et des impôts plus élevés que les pays d'immigration ? Face à l'escroquerie fiscale, les autochtones hautement qualifiés fuient également à l'étranger, tandis que le gouvernement importe constamment de nouveaux prolétariats migratoires. »

Rappelons que quatre millions d’allemands sont partis, pour des pays limitrophes germanophones ou pour le reste du monde.

La catastrophe Merkel, c’est aussi la tyrannie humanitaire, c’est aussi le fascisme sociétal. On termine alors :

« Outre les projets idéologiques, les charges fiscales exorbitantes surtout liées à l'expansion incontrôlée de l'industrie du social, pèse sur la population active. Dans les partis et les médias dominants, des mécènes et des partisans maintiennent fermement le lobby social sous contrôle. »

Qui réagira en Allemagne ? On revotera écolo, socialo, chrétien, démocrate ? Sans oublier 10-15% pour l’extrémisme facho-identitaire-toléré-syndiqué ? N’oublions pas que l’occident est un malade démographique, économique, culturel et que cela n’a rien à voir avec la fin de l’histoire du sieur Fukuyama : on n’assiste pas à la fin de l’histoire mais à la fin de l’occident qui projette sur le monde ses fantasmes de perdition. Quand on voit cet antipape inculte adorer la divinité amazonienne et les arbres, quand on voit les pasteures luthériennes renoncer aux signes chrétiens pour les remplacer par le croissant islamiste, quand on voit le satanisme US devenir la culture de masse, on se dit qu’on est mal barrés tout de même…

Sources

Cipolla – Les lois de la stupidité

Bonnal – Comment les Français sont morts

(Traduction libre Schwarze Rose pour les Observateurs.ch)

mardi, 29 octobre 2019

Frémissements populistes au Portugal

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Frémissements populistes au Portugal

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Le 6 octobre 2019 se tenaient des élections législatives au Portugal. Au cours des jours précédant ce scrutin, la grosse presse cosmopolite ne cessa pas de vanter la clique politicienne locale.

Bien qu’arrivée en tête aux élections de 2015, la droite modérée qui se désigne « sociale-démocrate », bel aveu de modération avancée, est incapable de s’entendre au point de laisser le pouvoir aux forces de gauche. Le Parti socialiste d’Antonio Costa négocie âprement avec son ennemi historique, le Parti communiste, et avec le Bloc de gauche, une sorte de condensé lusophone de Mélenchon et de Besancenot. Costa constitue un gouvernement socialiste homogène qui bénéficie du soutien parlementaire des communistes et des gauchistes. Cette alliance inédite n’empêche pas le Portugal d’appliquer une politique économique décidée par la troïka FMI – BCE – Commission de Bruxelles. La violence économique de l’austérité néo-libérale s’édulcore seulement de mesures progressistes d’ordre sociétal.

La médiacratie hexagonale s’extasie surtout de l’absence de tout signe de populisme. Le discours national-identitaire n’est guère audible dans l’opinion portugaise malgré une immigration croissante due à la conjonction de deux phénomènes : l’installation de plus en plus fréquente de ressortissants d’anciennes colonies ultra-marines et l’arrivée des retraités francophones et anglophones. Leur présence favorise la hausse rapide des prix de l’immobilier aux dépens des Portugais eux-mêmes.

Les résultats électoraux voient le vote socialiste croître de 4,3 points et remporter vingt sièges supplémentaires. Antonio Costa est sûr de retrouver son poste de Premier ministre. Le Bloc de gauche garde ses dix-neuf sièges tandis que la Coalition démocratique unitaire, un regroupement de diverses formations dont les communistes et les Verts, n’en a plus que douze, soit cinq de moins. L’alliance gouvernementale est reconduite avec une préférence – implicite – accordée au Bloc de gauche.

La politique sociétaliste de Costa suscite cependant une forte défiance populaire. Outre une abstention élevée (46,5 %), le mouvement environnementaliste et proto-animaliste de centre-gauche Personnes – Animaux – Nature s’emparent de trois autres sièges, soit un total de quatre élus. Mouvement de droite nationale, le Parti national rénovateur ne recueille que 15 272 suffrages (0,3 %), une perte de 0,2 point. Cet échec cuisant s’explique par le (modeste) succès de CHEGA !.

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Fondé le 9 avril 2019, CHEGA !, c’est-à-dire « ASSEZ ! », est dirigé par un professeur de droit de 36 ans, André Ventura. Il entre au Parlement avec 66 442 voix (1,30 %). Cet ancien adhérent du Parti social-démocrate entend importer au Portugal les méthodes du voisin espagnol Vox et, lusophonie oblige, l’activisme du président brésilien Jair Bolsonaro. CHEGA ! ne verse pas dans l’euroscepticisme et pencherait plutôt vers l’Alliance des conservateurs et réformateurs européens dorénavant dominée par le PiS polonais. Hostile à l’islam et au mariage gay, ce jeune parti politique promeut une ligne nationale-libérale conservatrice. Il s’affiche libéral en économie, nationaliste sur le plan culturel et conservateur dans le domaine sociétal. À l’instar de Vox, il se déclare irréprochable sur certains sujets supposés controversés et prend par conséquent bien soin de ne pas être confondu avec le RN français, la Lega italienne et l’AfD allemande.

Par cette élection surprise, l’illusion d’une Lusitanie préservée de tout affreux populisme, se dissipe enfin. Faut-il y voir une conséquence indirecte de la polémique de l’été ? En août dernier, le maire socialiste de Santa Comba Dao, Leonel Gouveia, proposa l’édification d’un musée, ou plutôt d’un centre d’étude et d’interprétation du régime de l’enfant de la commune, Antonio Salazar, le président du Conseil de l’« État nouveau » (1933 – 1974). Le 11 septembre suivant, à l’initiative du groupe communiste, le Parlement vota grâce à l’abstention d’une « droite » toujours aussi pleutre, une condamnation de ce projet qui offenserait la mémoire des « victimes » du salazarisme.

André Ventura est bien seul. Et alors ? Pendant près de vingt-huit ans, Jair Bolsonaro fut un député fédéral isolé et méprisé. En dépit d’un changement fréquent d’étiquette partisane, cet isolement politique le préserva des compromissions politicardes. Le président de CHEGA ! a-t-il commencé une longue marche qui en fera un jour le Bolsonaro du Portugal et de la Vieille Europe ?

Georges Feltin-Tracol

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 144, mise en ligne sur TV Libertés, le 21 octobre 2019.

lundi, 28 octobre 2019

Rétablir les liens avec la Russie n’est pas infondé

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Rétablir les liens avec la Russie n’est pas infondé

par Michel GRIMARD

Ex: http://www.europemaxima.com

Renouer des liens avec la Russie n’avait rien d’outrancier, comme voulaient le faire croire tous ceux qui, sans relâche, nous déconsidéraient sans nous permettre de nous exprimer. Il semble que nos appels à cesser de refuser le dialogue et à faire preuve d’un plus grand réalisme aient été entendus.

Notre conférence-débat du 20 mars dernier « Comment relancer les relations avec la Russie » a reçu un écho favorable. Elle a aidé à faire prendre conscience de l’absurdité des nocives relations franco-russes et du nécessaire rétablissement de liens raisonnables.

Comme l’a déclaré le Président Emmanuel Macron : « Il faut effacer les frictions passées, ce qui n’efface pas forcément des points de tension sur l’actualité. »

Nous nous réjouissons des propos chaleureux qu’il a tenus sur la Russie, « grande puissance profondément européenne ».

« Cette Europe qui va de Lisbonne à Vladivostok ».

Des positions constamment affirmées par le ROUE et qui figurent dans sa charte. De la même façon que la France a défendu la réintégration de la Russie au Conseil de l’Europe, elle doit œuvrer pour qu’elle retrouve sa place dans le G7, dont elle a été exclue en 2014 lors de l’annexion de la Crimée.

La crédibilité de ce groupe en dépend. Les membres du G7 sont-ils exempts de tous reproches ? Non, certains ont annexé ou maintiennent sous leur tutelle des régions ou des pays qui leur sont parfois plus étrangers que la Crimée à l’égard de la Russie.

Pour ne citer qu’eux, c’est le cas de l’Angleterre avec l’Irlande du Nord et Gibraltar, de la Chine avec le Tibet [Note de la rédaction d’Europe Maxima : la Chine n’appartient pas au G7…].

Puissance importante, incontournable sur la scène internationale, la Russie ne peut être absente du G7. L’Europe doit certes se soustraire aux antagonismes Washington – Moscou qui l’impactent, mais la Russie demeure le partenaire qui s’impose naturellement et logiquement à l’Europe. Seule la conjoncture dicte actuellement le rapprochement avec la Chine, dont les intérêts sur l’extrême Sibérie sont sources d’affrontements futurs avec la Russie.

L’Union européenne doit tenir compte de cette contradiction et agir avec maîtrise et subtilité à l’égard de la Russie, sans laquelle une Europe, même unie, serait orpheline d’un atout essentiel. Maintenir le lien transatlantique, certainement, mais en finir avec l’OTAN, instrument de vassalité de l’Europe au service des États-Unis, est un impératif.

Concevoir avec la Russie une nouvelle architecture de sécurité pour l’Europe, comme le souhaite le Président Emmanuel Macron, mérite intérêt, même si l’idée a été évoquée plusieurs fois dans le passé.

La réactivation la plus récente a eu lieu en 2010 sous la présidence de Dimitri Medvedev. En octobre 2011, le ROUE a d’ailleurs organisé un diner-débat sur le thème « L’Europe ne peut éviter une refonte de son architecture de sécurité ».

Monsieur Dimitri Rogozine, à l’époque ambassadeur de la Fédération de Russie auprès de l’OTAN, y participait. Il fut, dans les semaines qui suivirent, nommé vice-Premier Ministre, chargé de la défense et de l’industrie spatiale. Il est aujourd’hui Directeur général de la Corporation d’État de ROSCOSMOS.

Au moment où le Président Donald Trump montre sa versatilité concernant la défense de l’Europe et sa stratégie unilatérale de mise en cause des traités, FNI et à terme START III, le renouvellement de l’architecture de sécurité de notre continent devient une urgence.

Si la naïveté n’est pas de mise en diplomatie, il ne convient pas, pour autant, de bloquer toute initiative, comme le font la Pologne et les Pays baltes qui refusent systématiquement les discussions et recherches de paix, dès qu’il s’agit de la Russie.

Leur atlantisme viscéral les rend totalement tributaires de l’OTAN et ambivalents sur la défense européenne, car proches dans les déclarations, mais éloignés dans les actes. Ils agissent à l’opposé de la Finlande qui prône le dialogue avec la Russie, dont elle a eu également à pâtir.

Pour certains, le projet d’une nouvelle architecture de sécurité européenne serait un piège tendu par la Russie, au prétexte qu’elle serait mue par un unique but – détruire l’Europe –, alors que celle-ci n’aurait jamais manifesté la moindre agressivité.

C’est oublier sa volonté d’introduire l’OTAN en Ukraine et en Géorgie, pour compléter l’encerclement de la Russie. Au lieu de dresser des barrières sources de suspicions et par là même de conflits, recherchons des structures communes, privilégiant la paix.

Dans cet esprit et face au rejet des différents traités sur le contrôle des armements qui favorisent, de nouveau, leur libre prolifération, la France doit être présente lors des éventuelles discussions sur ce sujet.

La relance du Comité consultatif de coopération, gelé en 2014, participe à cette volonté de rapprochement voulue par le Président Emmanuel Macron. La réunion du 2+2 à laquelle participait d’ailleurs Dimitri Rogozine, ne peut que les prémunir mutuellement en facilitant la compréhension entre les deux pays.

Après avoir remercié la France pour ses efforts en faveur de la réinsertion de la Russie au sein du Conseil de l’Europe, le Président Vladimir Poutine a démontré sa volonté d’apaisement. Comme convenu, les échanges de prisonniers entre Kiev et Moscou ont eu lieu et se sont bien déroulés; d’autres doivent suivre.

Un début de processus de paix dans le Donbass, alliant élections et promulgation d’une nouvelle loi accordant un statut spécial pour cette région, a été salué comme une avancée majeure par la Russie. À Kiev d’agir.

Michel Grimard, président du ROUE

• D’abord mis en ligne sur EuroLibertés, le 16 octobre 2019.

samedi, 26 octobre 2019

Moyen-Orient. Que contient le mémorandum d'accord Erdogan-Poutine ?

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Moyen-Orient. Que contient le mémorandum d'accord Erdogan-Poutine ?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Ce mémorandum a été signé par les deux présidents lors de leur rencontre à Sotchi le 21 octobre. Son contenu vient d'être rendu public.

La rencontre a duré 7 heures, ce qui est considérable compte tenu du temps disponible pour les chefs d'Etat. A la fin de la rencontre ils ont signé un mémorandum conjoint dont le contenu est désormais connu. Dans ce document Recep Erdogan et Vladimir Poutine confirment leur plein accord à la nécessité de conserver l'unité politique et l'intégrité du territoire de la Syrie sous la présidence de Bashar al Assad, ainsi que leur volonté de conserver la sécurité au sein de la République turque.

Sur ce dernier point, ils ont confirmé leur détermination à combattre le terrorisme islamique et à ne pas accepter les prétentions de séparatistes visant à démembrer le territoire turc. Par le terme de séparatiste, ils désignent en particulier les mouvements kurdes visant à reconstituer un grand Kurdistan qui engloberait notamment le Kurdistan turc. 

Ils ont également assuré que le contrôle désormais assuré par la Turquie après son offensive militaire des derniers jours sur un couloir dit de sécurité long de 120 km et large de 32 située sur le territoire syrien ne sera pas remis en question. Il inclut les agglomérations de Tel Abyad et Ras Al Ayn. Ceci signifie concrètement que l'armée turque n'opérera plus désormais en dehors de cette zone. En revanche, la police militaire russe et les gardes-frontières syriens veilleront à ce que les unités militaires kurdes dites People's Protection Units (YPG) s'éloignent d'au moins 30 km de la bordure sud du couloir de sécurité. C

Ceci fait, fin octobre prochain, la zone sera contrôlée conjointement par des unités militaires russes et turques. Cependant, l'armée syrienne pour sa part conservera le contrôle des villes de Qamishly, Manbij et Tal Rifat.

Le mémorandum fait aussi des préconisations concernant la facilitation du retour des réfugiés ayant fui cette zone et la détection des terroristes pouvant s'y infiltrer, ainsi que ceux se trouvant dans des prisons kurdes au nord-est de la Syrie qui retrouveront la liberté. Selon certaines sources, ces terroristes mêlés de divers criminels pourraient être plus de 15.000. La plupart sont détenus dans les prisons kurdes de Shaddali, Hasakah et Allya. Ils se sont livrés à de nombreux crimes tels que décapiter les femmes kurdes et éventrer leurs enfants. Les Kurdes voudraient qu'ils soient jugés et punis en conséquence. Or le retrait précipité des YPG ne facilitera pas cette tâche, que les Russes n'auront certainement pas pour le moment les moyens de reprendre à leur compte. Le ministre de la défense russe Sergey Shoigu vient cependant de souligner l'importance de ce problème, ceci d'autant plus que ces terroristes proviennent de Russie et de divers pays européens et ne manqueront pas d'y retourner si leurs gardiens kurdes sont obligés d'abandonner leurs postes. rien n'est fait pour les en empêcher.

Lors de leur rencontre à Sotchi, ni Recep Erdogan ni Vladimir Poutine n'ont examiné ces questions essentielles à la sécurité de la région. Ils n'ont pas non plus abordé la question des 12.000 réfugiés vivant actuellement dans des camps dans les provinces de Al-Hasakah and Deir Ez-Zor. Certains de ces camps sont de très grande taille. Des dizaines de milliers de femmes, enfants et vieillards y vivent dans des conditions très précaires, manquant d'eau, de nourriture et de médicaments. Les maladies infectieuses s'y multiplient, notamment l'hépatite, les troubles intestinaux et la tuberculose. Nul parmi les ONG occidentales si promptes à dénoncer les atteintes aux droits de l'homme de Bashar al Assad n'évoque ces questions.

Un autre point n'a pas été abordé, malgré son importance. Il concerne le fait que les Américains, en dépit de leur retrait progressif de la région, conservent des contingents militaires importants pour protéger les gisements de pétrole appartenant aux compagnies pétrolières américaines ou convoités par elles. La récente rencontre du vice-président américain Mike Pence et de Recep Tayyip Erdogan à Ankara n'avait pas, comme l'on pouvait s'en douter, abordé cette question. La plupart des observateurs neutres constatent que les Américains ne sont pas venus au moyen orient en Iran pour combattre les djihadistes. Ils les auraient au contraire le plus souvent approvisionnés en armes et vivres. Ils sont venus pour y défendre leurs intérêts pétroliers. On imagine mal aujourd'hui qu'ils puissent cesser de le faire.

On notera que la Turquie, bien que membre de l'Otan et à cet égard alliée des Etats-Unis, confirme son statut d'allié de fait de la Russie. Washington laisse faire, compte tenu sans doute de l'importance géopolitique de ce pays;

Note au 26/10

On nous écrit: En France, un certain nombre de mouvements musulmans dits salafistes, c'est-à-dire encorageant le terrorisme, sont soutenus par le gouvernement turc. Beaucoup de mosquées sont directement fiancées par le Qatar, l'Arabie Saoudite, l'Algérie ou le Maroc. Nous sommes la proie d'un certain nombre de puissances étrangères qui veulent s'emparer de la France.

mardi, 22 octobre 2019

Britannia Exit. Le Royaume-Uni, l'Union Européenne et les répercussions du BREXIT dans un monde multipolaire

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Britannia Exit. Le Royaume-Uni, l'Union Européenne et les répercussions du BREXIT dans un monde multipolaire

Auteur: 
Irnerio SEMINATORE
Date de publication: 
16/10/2019

Ex: http://www.ieri.be

Le 31 octobre le Royaume-Uni quittera l'Union Européenne, où il était entré en 1973, après 48 ans d'adhésion et deux véto successifs de la part du Gén. de Gaulle, en janvier 1963 et en novembre 1967.

Deux tentatives infructueuses d'entrer dans la Communauté Economique Européenne (CEE) qui donnent la clé du divorce d'aujourd'hui, marquées, en 1963, par l'incompatibilité de l'économie anglaise avec les règles du « Marché commun » de l'époque et, en particulier de la politique agricole commune (PAC), l'économie britannique étant encore liée au Commonwealth en une zone mondiale de libre-échange et, en novembre 1967, par l'irréductibilité des intérêts insulaires (GB et Pays scandinaves) et des intérêts continentaux (les Six), doublés des relations privilégiées de la G.B.avec les Etats-Unis d'Amérique.

De surcroit l'orientation atlantiste de la politique étrangère et de défense de la Grande Bretagne et son refus de participer à la création d'une force nucléaire européenne indépendante aurait transformé, aux jeux de de Gaulle, la Communauté européenne en une Communauté atlantique et la première aurait été absorbée par la deuxième.

Ces vieux sentiments de singularité des britanniques ont ils joué un réflexe instinctif d'indépendance et de liberté dans les orientations populaires, lors du référendum de juin 2016 sur l'appartenance du Royaume Uni à l'Union européenne ?

Il est certain que, du point de vue historique, cette date marquera un échec du projet européen et un tournant décisif dans son évolution.

En effet, les dangers du consensus de masse, exprimés par le référendum britannique, ont pris le pas sur la définition de l'avenir du pays.

Ce retour à l'exercice intégrale de la « souveraineté » par un choix populaire, s'est fait dans des tensions internes, parlementaires et civiles, ainsi que dans l'incertitude internationale.

Trois arguments ont pesés sur le vote populaire: l'immigration, la zone euro et deux perspectives géopolitiques divergentes sur l'espace économique et politique vers lequel projeter l'avenir des deux ensembles.

De façon générale, le vote en faveur du Brexit a représenté pour tous, continentaux et britanniques, une victoire du populisme, du nationalisme et du souverainisme.

En France et en Europe l'impuissance des traités , à proposer une offre politique à la hauteur des défis, a mis en lumière, grâce au référendum, le clivage qui existe désormais entre deux visions de la société, nationale et internationale.

Le Royaume Uni, l'intérêt national et la « Balance of Power »

En effet, c'est au nom de « l'intérêt national » que la Grande Bretagne a toujours défini ses choix, en politique interne et en politique européenne , pronant ,dans le premier cas, l'unité du royaume, et, dans le deuxième, l'adoption du vieux principe du « divide et impera! ».

L'adaptation de l'intérêt national à la politique de « l'équilibre de puissance », comportant une surveillance permanente des intentions et des manœuvres des acteurs continentaux concurrents, afin que « ne soit pas tenue en une seule main une force supérieure à toutes les autres coalisées »!, a présidé à l'entrée réluctante de la Grande Bretagne dans la Communauté Économique Européenne en 1973.

Perspectives continentales et équilibres planétaires

Si les deux impératifs, de l'intérêt national et de l'équilibre de puissance, ont été les deux fils conducteurs du Royaume Uni depuis le traité de Utrecht (en 1713, reconfirmé par le Congrès de Vienne en 1805), rien de tel n'a joué pour les 27 pays membres, irréductibles à un principe d'action commun.

Or, l'identification des intérêts de survie et l' insertion de ces intérêts dans les nouveaux équilibres planétaires, portera-t-elle la Grande-Bretagne à oublier son encrage insulaire entre l'Europe et l'Amérique?

A première vue ,le Royaume-Uni vise désormais l'Océan Pacifique et l'Océan Indien (le vieux Commonwealth) dont le contrôle représente l'enjeu majeur du XXIème siècle, comme nouveau centre de gravité du monde, où battera le cœur de la grande finance internationale  et de la grande manufacture.

Un « Partenariat ambitieux » entre le Royaume Uni et l'U.E?

Face à une Union Européenne, à qui a fait défaut une capacité de conception et d'action géopolitique et stratégique globales et qui montre une impuissance singulière en matière monétaire, de politique étrangère et de sécurité, mais aussi de frontières et d'immigration, l'attractivité de jadis s'est commuée en délégitimation de son rôle et en diffractions internes multiples, qui rendent douteuses ses propositions de « partenariat ambitieux après le Brexit » (M. Barnier/ Le Figaro du 2 août 2018).

Le Brexit permet en effet de comparer deux interprétations du concept de « souveraineté ».

Du côté britannique, une conception unitaire et cohérente du pouvoir et de la légalité, en sa liberté de manifestations historiques, dont la principale s'exprime sous forme de « Balance of Power ».

Du côté de l'Union, une définition relative et partagée du pouvoir souverain, inessentielle du point de vue historique, artificielle du point de vue institutionnel et circonstancielle du point de vue stratégique.

Or, quelles histoires sont en train d'écrire aujourd'hui, ces deux acteurs de la vie contemporaine, le Royaume Uni et l'Union Européenne?

Une histoire de vassalisation du Royaume Uni à l'entreprise déclinante du projet européen, ou, en revanche, une nouvelle aventure de la liberté des peuples de langue anglaise et un retour des nations?

La souveraineté et le multilatéralisme selon Mike Pompeo

A l'échelle mondiale, le Secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, a déclaré, au même moment du référendum, au German Marshall Fund de Bruxelles, la fin du multilatéralisme, au nom de la priorité de la souveraineté américaine sur la logique du système international. 

Après avoir rappelé que le vieux système des interdépendances et de la coopération ne fonctionne plus et qu'il profite à des acteurs de l'ombre (la Chine), leurs permettant d'avancer des pions au sein des institutions supra-nationales ou de creuser un clivage entre les intérêts de bureaucraties non élues et leurs peuples et pays (U.E), Pompéo a rappelé que les intérêts de l'Europe et des États Unis précèdent ceux des institutions supra-nationales (ONU, UE, FMI, BM, OMC etc), puisque seuls les États-Nations peuvent garantir les libertés démocratiques et ont pour assise des peuples libres.

Un monde libre est un monde d’États-Nations et ne peut être en aucun cas un univers de bureaucraties supra-nationales.

Ce nouvel ordre ne peut jaillir que d'une profonde reforme des esprits et ne peut aspirer à la stabilité, que par l'affirmation d'un principe de cohérence, fondé sur le soubassement de trois notions, le Leadership, pourvu du sentiment instinctif de l'histoire, la capacité de décision et d'action, essentielle à la vie des États et l'ordre contraignant du monde, bannissant les compromis sans fin et les déclarations illusoires.

Il ne s'agit pas de rééquilibrer, mais de refonder l'ordre international!

Pas d'inclure l'ennemi ou la menace, mais de l'exclure et de les combattre!

Lorsque la liberté et la démocratie se dissocient et la foi dans la raison disparaît ou s'affaiblit, la « guerre civile » mondiale fait son irruption violente dans le coeur des nations.

La souveraineté et la géopolitique globale

Or, si « la souveraineté » est l'autorité, qui décide du cas d'exception, le Brexit, né d'un conflit entre deux principes, de légitimité et de décision, est millénaire pour l'empire britannique et circonstanciel pour l'empire des normes (l'U.E).

En son pur concept, la souveraineté reste le nœud incontournable du maintien ou de la déconstruction de tout ordre social, interne ou international et permet d'inscrire un pouvoir dans la géopolitique des grandes espaces, constitués, au XXIème siècle, par le Pacifique et l'Océan indien, comme pivots maritimes de l'Eurasie.

Ainsi, il est à parier que l'après Brexit sera marqué par la recherche d'un nouveau destin, planétaire et multipolaire, pour les deux ensembles concurrents,le Royaume uni et l'Union Européenne

De la vieille architecture euro-continentale de la sécurité, le Royaume-Uni héritera l'objectif historique d'une opposition permanente à la Russie et à toute organisation eurasienne à caractère stratégique, dans le but d’empêcher un rapprochement euro-russe et, encore davantage germano-russe, qui en ferait un ensemble dominant et menaçant.

La souveraineté et l'ordre libéral du monde

Le Brexit, comme beaucoup d'autres moments des relations euro-britanniques a été une victime du consensus de masse des démocraties et des tentations des classes dirigeantes, divisées, de satisfaire simultanément aux revendications populaires et aux objectifs à long terme de leurs pays.

En effet le défi a été de taille et a concerné le grand l'art de gouverner,autrement dit, la capacité de conjuguer les impératifs immédiats des passions populaires et les horizons de l'avenir.

Par ailleurs le Brexit marque la fin du sentiment d'appartenir à une même communauté humaine de peuples et de nations, distincte de toutes les autres, la communauté européenne, qui avait réussi à modérer par la raison et à atténuer par le calcul et par l'équilibre des forces, les rivalités continentales.

Pour conclure, le Brexit pousse à une reconsidération sur la résilience de l’État et de la souveraineté étatique, reposant, dans la conception post-moderne du projet européen, sur le soft power, la société civile et les droits de l'homme, dépourvus de l'expérience millénaire du conflit, de la tragédie et du « daimon » de la guerre.

A la recherche d'une autre idée de l'Europe

L'activation du débat sur l'épuisement historique du modèle de l'intégration a remis à l'ordre du jour la problématique traditionnelle relative à la primauté des Nations dans les relations européennes et internationales. Dans ce cadre, l'approche réaliste (permanence de la société hobbésienne et de l'anarchie internationale) n'exclut en rien l'approche idéaliste, autrement dit l'adoption d'un déterminisme volontariste pour tout projet historique.

L’Europe a besoin de réalisme pour raviver ses conceptions de la sécurité et de la puissance, sans adhérer à l'apostolat d'une doctrine, mais elle a besoin aussi d'idéalisme  pour réactualiser en permanence son idée de l'Europe.

Le « Brexit » et ses répercussions dans un monde multipolaire.

Le Brexit et ses options

La sortie de la Grande Bretagne de l’Union Européenne, comme acteur national essentiel, engendrera une série de répercussions, à caractère systémique

- sur l'interaction stratégique entre acteurs majeurs de la scène mondiale 

- sur la logique du risque politique, militaire et financier de l'ensemble occidental.

- sur les nouveaux modèles de gouvernance de l'UE

Ces répercussions peuvent conduire également à un séisme géopolitique prolongé : la dislocation du sous-système régional européen, car le retrait d'un acteur essentiel engendre instabilité et conflit.

En effet la défection d'un acteur étatique ne peut être compensée par un sous-système social, la « société civile », qui n'est pas inspirée par l'intérêt individuel d'un acteur national.

La sortie de l'Union fait reprendre au Royaume-Uni son rôle traditionnel de balancier dans les affaires du continent, comme arbitre de ses équilibres politiques et militaires et comme garant de son ancrage dans le camp euro-atlantique.

En puissance océanique et nucléaire, la Grande Bretagne renforce également sa liberté d'action sur la scène européenne, à travers l'OTAN (balance régionale), et sur la scène mondiale, par le biais du Commonwealth (balance planétaire) et favorise indirectement une distribution du pouvoir plus large et plus souple, qui augmente les incertitudes et pousse à l’établissement de nouvelles règles du jeu dans le domaine économique et financier.

Suite au Brexit, l'UE sera dans l'obligation de choisir entre un partenariat atlantique et un rôle planétaire d'acteur incomplet : la première option la place dans une position subordonnée vis-à-vis de la stratégie globale des États-Unis via l'OTAN, la deuxième dans une condition solitaire par rapport à une ré-configuration de son projet initial.

Il s'agit là de la quête d'un espace de manœuvre plus autonome et plus indépendant, à obtenir par des ententes bi-ou multilatérales, avec une ou plusieurs puissances extérieures, eurasiennes (Russie, Turquie, Moyen Orient, Chine) ou extra-européennes (États-Unis).

Le but de la réforme de l'Union serait de reprendre son rôle de puissance d'équilibre dans le système global, lui empêchant de dériver vers un vide géopolitique entre l'Est et l'Ouest et d'interdire la constitution d'alliances défavorables à ses intérêts, dans un monde multipolaire à forte compétition stratégique.

Par ailleurs un sous-système politique sans leadership ne peut se maintenir, car il est soumis à des forces centrifuges, qui aboutissent in fine à la désagrégation de l'ensemble.

La survie des États-Nations

En réalité la survie des États-Nations, même transformés par le processus d'intégration, pose à l'Union européenne trois problèmes majeurs, qui méritent un examen critique et un bilan d'étape, théorique, historique et stratégique.

  •  Le premier concerne l’hypothèse aronienne et bien connue : « Peut-on aller au-delà de l’État-Nation ? » Or,cette hypothèse a pour objet une analyse de la notion d'autonomie et d'indépendance politiques

  •  Le deuxième concerne le multilatéralisme et donc la communauté juridique des nations qui ont leur expression supranationale et universelle dans l’organisation de sécurité des Nations Unies

  •  Le troisième, l’économie mondiale, ou le processus de mondialisation en cours, ou encore la tendance à une interdépendance planétaire sans cesse accru 

Qu'est qu'une Europe politique?

A-t-on perdu la notion du politique?

Est politique une Europe dressée sur une hiérarchie et donc sur un « leadership » reconnu, articulant la « verticale des responsabilités », en une série de cercles de nations, différenciées entre elles.

Cette Europe avec leadership, s'oppose à la démocratie égalitariste, autrement dit, à l'Europe « puissance civile », liée à la défense du « statu quo », constamment remis en cause dans la scène internationale.

A partir de l'expérience séculaire de l'Histoire, décideurs et stratèges savent pertinemment que la sphère de la politique est un maillage, dans lequel se nouent et se déploient des rapports de force, des rapports de domination, ainsi que des rapports de compétition et de lutte entre individus, groupes, classes, ethnies, peuples et nations, autour de trois grands enjeux: l'idée, l'ambition et la puissance et que dans ce contexte, seule une « Europe des Nations »,est en mesure de préserver la personnalité, l'identité et l'homogénéité, culturelles et civilisationnelles, élaborées par l'Europe, au cours d'une histoire vingt huit fois séculaire.

 

Bruxelles, 7 octobre 2019

lundi, 21 octobre 2019

Chisinau Forum III: Gilles-Emmanuel Jacquet – Discours (VIDEO)

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Chisinau Forum III:

Gilles-Emmanuel Jacquet – Discours (VIDEO)

 

Gilles-Emmanuel Jacquet, politologue, diplomate, journaliste, Suisse

En 1997 Zbigniew Brzezinski exposa dans son ouvrage «The Grand Chessboard » (« Le Grand Échiquier ») cette vision stratégique qui correspond à la politique étrangère des États-Unis d’Amérique : afin d’établir une hégémonie globale les USA doivent contrôler l’Eurasie, en particulier sa périphérie (le « rimland » de Nicholas J. Spykman) et contenir les puissances continentales du « heartland » telles que la France, l’Allemagne et la Russie mais aussi plus récemment la Chine et l’Inde.

Après la dissolution de l’URSS et la fin du système bipolaire de la Guerre Froide, les USA cherchèrent à établir à l’échelle globale un système unipolaire dont ils seraient les garants et dont les valeurs occidentales libérales apporteraient aux peuples du monde la paix, la démocratie, les droits de l’Homme et la prospérité. Les attentats du 11 septembre 2001 contredirent ces espoirs mais le gouvernement de G.W. Bush et les penseurs néo-conservateurs américains ne remirent pas en question leur vision du monde. Le multilatéralisme, le droit international et l’ONU furent ignorés et en 2003 les USA attaquèrent l’Irak qui n’avait développé aucune arme de destruction massive à ce moment-là et n’avait aucun lien avec les attentats du 11 septembre ou Al-Qaïda. L’Irak fut dévasté par un conflit qui n’est pas terminé et la situation au Moyen Orient s’aggrava. La recherche d’une solution au conflit israélo-palestinien ainsi qu’au statut du Golan syrien occupé par Israël fut peu à peu abandonnée. Le Printemps Arabe de 2011 fut l’occasion pour les États-Unis, ses alliés du Golfe (Qatar, Arabie Saoudite ou Émirats Arabes Unis), la Turquie et Israël de déstabiliser certains pays comme la Syrie ou la Libye dont les régimes hérités du nationalisme représentaient des obstacles à leurs projets régionaux. La politique étrangère menée par les USA et ses alliés au Moyen Orient ou en Afghanistan durant la Guerre Froide puis lors du Printemps Arabe ainsi que le soutien à des partis ou des groupes armés islamistes ont également joué un rôle dans le développement du terrorisme islamiste à l’échelle régionale et mondiale. 

 

Alors que l’Iran avait cherché à de nombreuses reprises au cours des années 2000 à nouer de nouvelles relations diplomatiques et commerciales avec l’Europe et même les USA, ces derniers ont décidé de retourner à une logique de confrontation avec Téhéran. Malgré ce qu’avait déclaré le Président Donald Trump lors de son voyage en Arabie Saoudite, l’Iran ne représente aucune menace pour les pays occidentaux ou l’Europe du point de vue du terrorisme. L’Iran a été également victime du terrorisme islamiste sunnite, en particulier d’ISIS, et coopère avec de nombreux pays dans la lutte anti-terroriste. Dans la crise iranienne, les USA ne suivent pas leur intérêt national qui leur commanderait plutôt de poursuivre le dialogue et l’ouverture mais les préoccupations de l’Arabie Saoudite ou d’Israël qui ne souhaitent pas voir Téhéran jouer un rôle de puissance régionale. 

En Europe, l’expansion de l’OTAN et des USA au cours des années 1990 et 2000, a ravivé et aggravé d’anciens conflits dans les Balkans ou dans le Caucase comme ce fut le cas avec le conflit de 2008 en Géorgie et en Ossétie du Sud. Le conflit qui touche l’Ukraine orientale depuis 2014 est un des symptômes de la faiblesse politique et géopolitique de l’Union Européenne ainsi que de sa dépendance stratégique envers les USA à travers l’OTAN. Un peu moins de vingt ans après le conflit en ex-Yougoslavie et une quinzaine d’années après celui du Kosovo, l’Union Européenne échoua à empêcher un nouveau conflit d’éclater sur le continent européen et permit aux USA et à l’OTAN de renforcer leur influence aux frontières de la Russie. 

Cette politique visant à établir un système international unipolaire sous hégémonie des USA a mené à de nombreux conflits au cours des trente dernières années et a porté atteinte au droit international ainsi qu’au fonctionnement et à la crédibilité de nombreuses organisations internationales comme l’ONU. Washington et l’OTAN ont également recréé une nouvelle Guerre Froide en Europe en utilisant d’anciennes rivalités nationales ou problématiques ethnolinguistiques (Ukraine) et en instrumentalisant la mémoire des crimes du communisme (Ukraine, Pologne) afin de créer un fossé toujours plus grand entre la Russie d’un côté et ses voisins ainsi que l’Europe occidentale, de l’autre. 

 

Avec la renaissance de la puissance chinoise et la mise en place de la nouvelle Route de la Soie, l’axe du monde s’est déplacé vers l’Asie et la région de l’Océan Pacifique. En restant dans l’OTAN et en ne développant pas de partenariat privilégié avec la Russie, les pays de l’UE risquent dans le long terme de ne pas être assez puissants afin de contrebalancer la puissance chinoise en Eurasie. Alors que les penseurs néo-conservateurs américains et les atlantistes en Europe continuent de défendre la vision d’un système mondial unipolaire placé sous la domination prétendument bienveillante des États-Unis, l’émergence des BRICS est le signe que le monde est devenu réellement multipolaire et qu’il est temps pour certaines puissances occidentales de respecter des principes fondamentaux du droit international qu’elles avaient subverti par le biais de l’instrumentalisation des droits de l’Homme. 

Le respect du droit international, de la souveraineté des États et de la Charte des Nations Unies va de pair avec la vision d’un monde multipolaire, d’un système international reconnaissant la pluralité et la liberté des nations, dans lequel chaque État jouit réellement des mêmes droits tout en restant maître de son destin. L’ONU fournit un forum adéquat mais certaines puissances, en particulier occidentales, ont subverti certains de ses principes et son fonctionnement. Afin de refléter réellement et équitablement l’évolution du monde vers un système multipolaire le Conseil de Sécurité des Nations Unies doit être réformé mais aucun consensus n’est apparu à cause de contentieux historiques et politiques entre certains pays (comme la Chine et le Japon ou l’Inde et le Pakistan). Enfin, le respect du chapitre VII de la Charte des Nations Unies et l’application des articles 46 et 47 sur la mise en place d’un Comité d’état-major devant assister le Conseil de Sécurité pourrait empêcher l’OTAN de violer le droit international et la Charte des Nations Unies ou d’outrepasser ses instructions, comme cela s’était produit lors des conflits au Kosovo et en Libye.

Actualités européennes : le refus de l’intégration balkanique

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Actualités européennes : le refus de l’intégration balkanique

par Eugène Guyenne

Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com

Récemment, Emmanuel Macron, avec Mark Rutte (Premier Ministre néerlandais) et le premier ministre danois, s'est posé en étendard de la continuité de l’entrisme atlantiste dans l’Union Européenne, et ce en rejetant l’entrée des pays balkaniques, avec la Macédoine du Nord et l’Albanie à l’ordre du jour, provoquant de nombreuses déceptions dans ces deux pays.

Tant chez la chancelière allemande Angela Merkel, que chez le président de la Commission Européenne Jean-Claude Juncker, ce dernier dénonçant même “une lourde erreur historique” et que “pour être crédible, elle [l’Union européenne] doit respecter ses engagements”, que chez le président du Conseil européen Donald Tusk mentionnant qu’une « écrasante majorité des États membres étaient favorables » à l’ouverture des négociations avec les deux candidats, qui requiert l’unanimité des États membres, tous ont manifesté leur mécontentement.

Alors que le dossier balkanique, comme le Brexit, est encore repoussé aux calendes grecques (au printemps 2020 lors du prochain sommet UE-Balkans organisé à Zagreb, où la Croatie sera la prochaine directrice pendant 6 mois), Zoran Zaev (Premier ministre de Macédoine du Nord) a proposé qu’aient lieu des élections anticipées, dont les dates seront dévoilées le 20 octobre 2019, en réaction à cette décision de rejet de Bruxelles.

Et encore une fois, s’il fallait en douter, l’Union Européenne prouve qu'elle est une « Europe des États », par nature stérile avec toujours le même manichéisme occidental où les « projets européens » sont perpétuellement repoussés à plus tard.

En attendant peut-être un changement, grâce au Parti des Européens (LPE).

Eugène Guyenne (Le Parti des Européens)

dimanche, 20 octobre 2019

Europe Is Turning Against Free Trade

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Europe Is Turning Against Free Trade
 
New European Commission President Ursula von der Leyen wants a “carbon tariff” on imports to Europe.

After decades of piously reciting neoliberal orthodoxy, extolling a ‘post-political’ borderless world, the European Union seems finally to be turning away from free trade. Numerous factors are working in this direction: a decades-late reaction to China’s mercantilist trade policies which have gutted European industry, the threat of trade wars with America under President Donald Trump, the withdrawal of free-trading Britain from the EU, the rise of Big Tech everywhere but Europe, and ordinary Europeans’ angry reaction to policies which have destroyed their jobs only to enrich footloose capitalists and tax havens.

I have been struck by a rather marked changed of tone among eurocrats in recent months, both among the incoming administration of future Commission President Ursula von der Leyen and the éminences grises of EU think-thanks. Von der Leyen herself has said she will “introduce a Carbon Border Tax” in order “to ensure our companies can compete on a level playing field.” This would presumably be a tariff according to amount of carbon that went into producing a product, hitting China and other industrial exporters most. A carbon tariff has been a long-time ask for protectionist-leaning French politicians.

Von der Leyen, a conservative German politician, has rather implausibly promised a “Green New Deal” for Europe. As such we can expect any-and-all government initiatives these days to be justified by some vague reference to the environment, under the sign of Saint Greta. (Seriously, why has Greta not been awarded a Nobel Peace Prize yet? Why has that doddering old Pope Francis not canonized her? Surely the dying and two confirmed miracles requirements are mere formalities at this point.) It is almost as if human rights’ claim of a sacrosanct private sphere of individual choice fails to recognize the basic interdependence of all things. Ho hum.

The influential think-tank Bruegel – which is run by former top European officials – has been moving away from the EU’s traditional neoliberal trade policies and laissez-faire attitude. Bruegel published a recent paper making “the case for industrial policy”:

The Chinese authorities . . . have cleverly used state subsidies to promote AI and support domestic firms. To help counter this challenge, Germany and Europe should respond with their own subsidies to knowledge-based sectors. Europe’s automotive industry is an obvious candidate for such support. This is why Altmaier’s plan to develop European battery production for electric cars make sense, and may even accelerate an industrial renaissance across the continent.

Whatever one thinks of such arguments, it certainly marks a significant shift in EU thinking.

There has also been talk of restoring Europe’s “economic sovereignty,” which has never really recovered since the Second World War. Since then, Europe has been dependent on Mideastern oil, U.S. economic aid, military support, and tech companies, and Chinese industrial prowess. European companies have been increasingly vulnerable to being bought up by foreign capital.

In France, there has been a longstanding critique of the EU’s economic policies and a demand to implement a protectionnisme européen (“European protectionism”), most notably voiced by the euroskeptic demographer Emmanuel Todd. This was long a pious wish, but with Britain on the way out and Germany itself churning out its own industrial policy, it looks like things may be changing. Not only France, but also much of southern and eastern Europe, are basically protectionist in outlook, leaving the free-trading Dutch and Nords rather isolated.

It’s easy to mock the EU as fake and gay – rightly so in certain areas, such as foreign policy – and prone to perpetual gridlock. But if there’s one area where the EU has real power, it’s on economic matters: namely market regulation, trade, and antitrust.

EU Commissioner for Competition Margrethe Vestager has been making a name for herself in recent years by inflicting billions of euros in fines on American tech giants, mostly for unpaid taxes. Hervé Juvin – a prominent environmentalist intellectual who has been elected to the European Parliament as a candidate of Marine Le Pen’s National Rally – recently asked Vestager:

Madam Vestager, complements on your past actions . . . You express with great conviction your faith in the [EU] single market. I however observe that Europe is not in the lead concerning IT and AI. I also observe that in economic history never has a country caught up in a given sector except by protecting it behind demanding tariff and non-tariff barriers. My question is then: How can you help Europe catch up in the IT and artificial intelligence fields without abandoning the dogma of freed trade . . . without building up an effective external border for the single market, as our Chinese and Russian rivals have been able to do?

Certainly, the EU easily has the capacity – that is to say the human capital – to produce indigenous tech giants, as China and Russia do. The trend so far has been for American companies to hoover up any promising European start-ups or for them to become marginal over time, as their dominance of any given national market proves to be totally insufficient to rival a company dominant in the far larger U.S. market.

In addition to these factors, one can also sense demand among the metropolitan classes for a more powerful EU as America and Britain have moved to their own more-or-less vapid brands of nativist populism. As Gideon Rachman of the Financial Times recently argued in an article tellingly entitled “The EU needs to be a power project”: “The EU once dreamt that the whole world would move towards a law-based system, similar to the EU method. But a world order, shaped by Xi Jinping’s China and Trump’s America, will be based on power rather than rules.”

All roads lead to Carl Schmitt, it seems.

Whether the metropolitan classes – at once privileged and ineffectual, contemptuous of the very nations and states through which mass action is actually possible and power actually exercised – can actualize their dreams for the EU is another question.

Open borders, in the absence of a cross-border regulator, of course means a kind of lawlessness. But, as it turns out, opening up borders is a lot easier than instituting some kind of common “governance” across borders. Hence, if Europeans wish to preserve their way of life and govern their own space, they will have to reinstate an effective external border, the crossing of which occurs only occurring to the will and interests of the European peoples.

I would love Europe to be a well-regulated, sovereign, and European space. Self-sufficient, open to fruitful economic and cultural exchanges of the world, but maintaining its identity and character in perpetuity. I can imagine Europe as a beautiful garden. Is that too much to ask?

jeudi, 17 octobre 2019

OPA territoriales

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OPA territoriales

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

L’été a connu une affaire que beaucoup ont pris pour une nouvelle provocation loufoque de Donald Trump. L’édition du 15 août 2019 du Wall Street Journal révélait l’intérêt de l’actuel président des États-Unis pour le Groenland. Il aurait proposé d’acheter l’île arctique au Danemark. Le royaume danois jugea la démarche vaine.

Dépendance de Copenhague, le Groenland dispose d’une large autonomie interne et n’appartient plus depuis le milieu des années 1980 à l’Union dite européenne. Au moment où la route maritime du Nord deviendrait plus accessible, il occupe une position géopolitique essentielle. Outre la présence de gisements d’hydrocarbures, son sous-sol regorgerait d’or, de zinc, de cuivre, de graphite, de nickel, de platine et d’uranium.

Loin d’être une énième pitrerie, Donald Trump inscrit son étonnante proposition dans l’action de ses prédécesseurs. À deux reprises déjà, la Maison-Blanche a voulu acheter l’île; en 1867, puis en 1946 pour un montant de cent millions de dollars… L’homme d’affaire devenu président relance ainsi une vieille pratique étatsunienne : l’achat plus ou moins honnête de territoires.

La formation des États-Unis aux XIXe et XXe siècles se réalise autour du regroupement de terres acquises à vil prix. En 1803, le Premier consul Bonaparte vend pour quatre-vingt millions de francs le vaste territoire de la Louisiane entre le Golfe du Mexique et les confins du Canada. Sous-peuplée et mal défendue, la Louisiane constituait une cible prioritaire pour la belliqueuse Angleterre dans son espoir de soumettre ses anciennes colonies rebelles. En 1819, l’Espagne reçoit cinq millions de dollars pour la cession de la Floride. En 1848, les États-Unis font un bond territorial considérable. Suite à une féroce guerre d’invasion, les États-Unis versent au gouvernement mexicain un pourboire de quinze millions de dollars dans le cadre du traité de Guadalupe. Ce traité biaisé offre à la jeune puissance nord-américaine le Texas, la Californie, l’Utah, le Nevada, l’Arizona, le Colorado et le Nouveau-Mexique. Cinq ans plus tard, en 1853, l’Étatsunien James Gadsden négocie avec Mexico, un accord sur la rectification frontalière méridionale du Nouveau-Mexique. Washington y achète une bande de terre de 76 800 km² dans laquelle se trouvent les villes bien connues des cinéphiles fans de western, Yuma et Tucson.

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En 1867, les États-Unis réussissent un très beau coup territorial. Partisan du Nord pendant la Guerre de Sécession entre 1861 et 1865, le tsar Alexandre II commet l’erreur irréparable de vendre l’Alaska pour la somme de sept millions deux cents mille dollars. La Russie perd sa dimension tricontinentale qui lui aurait permis de faire du Nord de l’océan Pacifique un lac russe. En 1899, le traité de Paris arrête la guerre entre l’Espagne et les États-Unis. Contre vingt millions de dollars, Madrid cède Porto Rico, les îles de Wake et de Guam dans le Pacifique ainsi que les Philippines et Cuba. Un an plus tôt, les États-Unis avaient annexé la république bananière d’Hawaï…

En 1917, Washington achète enfin au Danemark pour vingt-cinq millions de dollars sa part des îles Vierges. L’autre partie de cet archipel des Antilles appartient toujours au Royaume-Uni. Par cette acquisition, les États-Unis renforcent leur emprise sur les aires centre-américaine et caraïbe.

Réclamer le Groenland revient par conséquent à poursuivre une vieille politique géo-boutiquière. Bien des critiques de Trump n’ont toujours pas compris que son impulsivité ne l’empêchait pas de réfléchir. Cette manie douteuse d’acheter des territoires s’applique jusqu’au continent européen puisque qu’est-ce que l’OTAN, sinon la meilleure justification pour manipuler des gouvernements soi-disant européens plus que jamais déférents envers leur maître d’outre-Atlantique ?

Georges Feltin-Tracol

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 142, mise en ligne sur TV Libertés, le 7 octobre 2019.

Syrie: la Turquie, vecteur d’un plan B américain ? (débat)

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Syrie: la Turquie, vecteur d’un plan B américain ? (débat)

 
a quasi coïncidence est extraordinaire: y a-t-il un quelconque lien entre l’agression de l’armée turque contre le nord-est de la Syrie à la faveur du feu vert US et la tentative de coup d’État qu’a connu la semaine dernière l’Irak ?

Au Moyen-Orient, tant que les États-Unis maintiendront leur présence, toutes les guerres seront imbriquées. Ce vendredi, alors que l’artillerie et l’aviation turques continuent à frapper des localités syriennes, les FDS ont procédé à quelques étranges libérations: plusieurs chefs terroristes de Daech ont été libérées avant d’être remis aux forces américaines qui les ont transférés en Irak. La Turquie est-elle le vecteur d’un plan B américain amorcé avec le pseudo retrait US du Nord syrien ?

 

Pierre Dortiguier, politologue, et Ayssar Midani, analyste franco-syrienne des questions internationales, s’expriment sur le sujet.

Source: https://www.presstv.com

mercredi, 16 octobre 2019

La tragédie des Kurdes, fruit douloureux de notre Irrealpolitik

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La tragédie des Kurdes, fruit douloureux de notre Irrealpolitik

Déclaration conjointe du Conseil d’administration de Geopragma, le 10 octobre 2019 : 

La situation des Kurdes syriens est tragique. Elle illustre les souffrances d’un peuple sans Etat éparpillé aux quatre coins de plusieurs pays. Mais se lamenter n’est pas suffisant. Le réalisme nous impose de voir que la situation actuelle découle en partie de la stratégie floue et hasardeuse des puissances occidentales dans le conflit syrien depuis 2011.

Depuis 2011 une absence d’analyse stratégique

Voici ce que nous pouvions savoir dès 2011 :

  • Membre de l’OTAN, la Turquie n’accepterait jamais l’existence d’un Kurdistan syrien autonome ou pire, indépendant, si celui-ci venait à être parrainé par les Kurdes turcs du PKK ;
  • Les Kurdes sont des alliés militaires extrêmement utiles contre notre ennemi principal que sont les différents avatars du djihadisme sunnite, qu’il s’agisse de l’Etat islamique ou d’autres groupes dits « rebelles » ;
  • Le seul Kurdistan existant pour l’instant de façon autonome est celui d’Irak : sa viabilité tient d’une part à son maintien au sein des frontières irakiennes, d’autre part à ses relations pacifiées avec la Turquie, lesquelles sont fondées sur l’exportation des hydrocarbures vers Ankara et le non-soutien au PKK ;
  • Le djihadisme et plus globalement le chaos politique prospèrent notamment sur la déréliction des structures étatiques. La création de vastes zones sans réelle et solide gouvernance doit être évitée au maximum ;
  • Les opérations de « nationbuilding » fonctionnent mal, plus encore si l’Etat nation à construire est vu comme une menace par la plupart de ses voisins. Elles exigent par ailleurs un coût financier et une durée d’intervention qui sont absolument incomparables avec ceux d’une opération militaire classique.

Nous pouvions dès lors tirer plusieurs conclusions négatives :

  • Créer une enclave kurde de facto dissociée du gouvernement syrien et dominée par le PKK amènerait inéluctablement à une intervention turque ;
  • Les puissances occidentales n’auraient pas réellement les moyens de s’opposer à une telle intervention menée par un membre de l’OTAN ;
  • Plus largement, la création d’un Kurdistan syrien viable représenterait un projet économique et politique excédant les capacités des puissances occidentales, d’autant que le modèle économiquement collectiviste et politiquement autoritaire du PKK empêcherait tout développement harmonieux.

Etant donné cela, associer les Kurdes à la lutte contre Daech était une nécessité à la condition que cette association se fasse dans le cadre d’une coordination minimale avec le gouvernement syrien et avec ses alliés russe et iranien. Au début du conflit, un accord tacite a d’ailleurs été passé entre les Kurdes syriens et le gouvernement de Damas : il s’agissait d’une sorte de pacte de non-agression, l’armée syrienne et les milices chiites laissant le champ libre aux Kurdes pour s’occuper d’eux-mêmes.

L’utilisation des Kurdes par les Américains dans une logique de containment à courte vue

Mais cet accord tacite est progressivement tombé avec la création des Forces démocratiques syriennes sous l’égide des Américains : les objectifs de la coalition arabo-kurde, mais dominée par les Kurdes, était d’une part de lutter contre Daech, mais d’autre part d’endiguer la reconquête par Damas des zones djihadistes, notamment à l’Est de l’Euphrate. Si le premier objectif était évidemment des plus louables, ce second objectif, jamais clairement assumé, condamnait les Kurdes à devenir les supplétifs des Etats-Unis et à voir leur territoire servir de point d’appui depuis lequel Washington pouvait espérer continuer d’exercer une certaine pression sur l’ensemble des acteurs régionaux. L’espace conquis par les FDS descendant bien au sud des zones de peuplement kurdes pour couvrir tous les territoires syriens à l’est de l’Euphrate entrait dans une logique de « containment » pour empêcher la structuration d’un axe Téhéran-Bagdad-Damas-Beyrouth.

La tragédie que les Kurdes vivent découle largement de cette situation. Ceci est d’autant plus cynique que les Etats-Unis savaient dès le début, qu’ils ne resteraient pas éternellement en Syrie, qu’ils ne mettraient pas les milliards nécessaires à la reconstruction du Kurdistan syrien et qu’en cas de conflit entre les Kurdes et la Turquie, ils choisiraient (certes en protestant) Ankara, membre de l’OTAN.

Nous y sommes, pour le plus grand malheur des Kurdes. La situation des Kurdes syriens est le fruit de l’irreal politik occidentale qui sévit, pour le cas de la France, depuis le tournant atlantiste de notre diplomatie et l’abandon des principes gaulliens qui, en matière de politique étrangère, ont été jusqu’en 2003 un socle commun partagé tant par la droite que par la gauche. Cette époque révolue nous manque. Elle manque aussi aux peuples du Moyen-Orient.

Que peut faire la France  pour les Kurdes?

Même si la résistance kurde apparaît réelle, il est probable que Recep Erdogan finisse par obtenir, peu à peu, le corridor d’une trentaine de kilomètres de large qu’il souhaite établir le long de la frontière syro-turque pour installer les centaines de milliers de migrants syriens, dont la population turque ne veut plus. Cette dimension migratoire n’est pas sans représenter, pour nos pays occidentaux, une menace mortelle en matière de risque terroriste. Le Kurdistan syrien ne peut demeurer ce qu’il a été trop longtemps, pour le malheur des Kurdes eux-mêmes, une enclave occidentale visant à endiguer le trio Damas-Téhéran-Moscou.

La seule option qui permettrait d’éviter ce scénario du pire et qui préserverait la sécurité  des Kurdes est une solution à l’irakienne :  une région kurde disposant d’une large autonomie au sein d’une Syrie unitaire mais fédéralisée. Mais ceci exige d’abandonner la politique irréaliste de suivisme des Etats-Unis conduite depuis 2012, de favoriser un dialogue entre le gouvernement syrien et les représentants kurdes de Syrie.

Nous en sommes très loin tant, dans chaque camp, les positions sont aujourd’hui opposées… Seuls contre tous et forts de notre seul soutien moral, les Kurdes ne survivront pas longtemps. Il existe néanmoins aujourd’hui un dialogue régional entre les principales puissances (Turquie, Iran, Irak, Syrie) coordonné par la Russie. La France ne peut retrouver une influence dans cette région qu’en s’inscrivant dans ce contexte. Nier l’existence de cet espace de discussion serait une aberration, même s’il nous énerve naturellement car il symbolise l’ampleur de l’affaiblissement de notre influence au Levant. En tenant compte des équilibres locaux et régionaux plutôt qu’en privilégiant  une internationalisation du conflit, la France pourrait à la fois être fidèle à ses alliés kurdes contre l’islamisme radical, restaurer une présence en Syrie et retrouver petit à petit le rôle de médiateur qu’elle a abandonné pour un suivisme contraire à ses intérêts et à son rôle dans le monde.

Sanctions antirusses : un coût de 1,5 milliard d’euros par mois pour l’Europe, selon une étude

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Sanctions antirusses : un coût de 1,5 milliard d’euros par mois pour l’Europe, selon une étude

Ex: http://www.zejournal.mobi

Le premier quotidien économique allemand vient de publier les conclusions de deux chercheurs qui évaluent l'impact commercial des sanctions occidentales contre la Russie. Selon eux, elles coûteraient cher à l'Europe, et en particulier à l'Allemagne.

Dans sa politique de sanctions contre la Russie depuis la crise ukrainienne de 2014, l’Europe est-elle victime de «tirs amis», comme l’affirment Matthieu Crozet, de l'Université Lingnan de Hong Kong, et Julian Hinz, de l'Institut pour l'économie mondiale de Kiel ?

Ces deux chercheurs viennent en effet de réaliser un étude intitulée «Tirs amis: l'impact commercial des sanctions prises par la Russie et des contre-sanctions». Elle doit prochainement paraître dans Economic Policy, la revue savante de l’European Economic Association qui rassemble les publications d’Oxford, de Sciences Po et de l’Université de Munich.

Le quotidien économique allemand Handelsblatt, qui se l’est procurée, en révèle les principales conclusions : les sanctions décrétées par 37 pays dont les Etats-Unis, le Japon et les 28 Etats membres de l’UE représentent un manque à gagner commercial de 4 milliards de dollars par mois supporté presque à parts égales par la Russie (52%) et les pays qui ont introduit les sanctions (48%). Mais l’Union européenne est la principale concernée avec 92% des pertes des pays ayant introduit les sanctions, soit un manque à gagner mensuel de près d’un milliard et demi d’euros.

Le quotidien allemand explique que pour parvenir à ces chiffres,  les deux chercheurs ont décomposé le commerce avec la Russie en différents pays et catégories de produits. Puis ils ont élaboré des scénarios de développement normal de ces différents marchés sans sanctions qu’ils ont comparés avec le développement réel. La différence obtenue constitue le montant de la perte commerciale imputable aux sanctions et aux contre-sanctions décidées en réponse par la Russie.

38% des pertes au détriment des entreprises allemandes

Mais parmi les Etats membres, il en est un qui a particulièrement souffert, l’Allemagne, selon l’étude des deux chercheurs qui lui attribuent 38% des pertes des pays associés aux sanctions contre la Russie. Le Handelsblatt rappelle dans son article daté du 11 octobre que des chefs d’entreprise et des hommes politiques allemands se plaignent régulièrement de ces sanctions, le Premier ministre du Land de Saxe, Michael Kretschmer, ayant fait sensation en juin en demandant leur levée.

Fait remarquable, Hinz et Crozet affirment qu’une part importante des dommages causés au commerce avec la Russie ne sont pas liés à des interdictions d’exportation ou d’importation de certains produits, mais indirectement. Les sanctions financières imposées par les Etats-Unis à l’égard d’une liste d’institutions financières et d’entreprises énergétiques russes de plus en plus longue ont joué un rôle crucial dans l’effet de ralentissement des échanges.


- Source : RT (Russie)

mardi, 15 octobre 2019

Potential military action against Iran and the Nagorno-Karabakh conflict

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Potential military action against Iran and the Nagorno-Karabakh conflict

 
Dr. David Shahnazaryan
 

The purpose of this article is not to analyze the situation around Iran and all the possible scenarios.We just would like to present some considerations in view of the dangerous developments around the Islamic Republic, as Washington and Tehran remain locked in the ongoing standoff with no end in sight.

Despite some recent positive trends and moves,which have reduced the risk of a possible military action against Iran, the situation around the Islamic Republic remains quite explosive. U.S. attempts to put together a new coalition of nations to counter what it sees as a renewed maritime threat from Iran, the deployment of warships in the Persian Gulf, the seizure of oil tankers and destruction of military drones have created a situation, when hostilities are more likely to betriggered by the so-called ‘war by accident’, rather than by a political decision of one of the major involved partis.

Given the large number of key players and stakeholders in this process, involving both public and non-public actors, it is not ruled out that one of the players may attempt to provoke a hostility that could be portrayedas ‘war by accident’.

In case of the worst possible scenario –if hostilities and war breakout – it is obvious that ground operation against Iran is practically impossible, first of all, because of geography–we mean mountain ranges along some of its border, deserts in the east,swamps in the south  and Turkey in the east that would not let US troops use its land to invade Iran.

But it is also evident that the geography of the military operation theater would expand significantly across the region. Military operations may embracecountries that would be involved in war inadvertently. As a result, the number of nations involved in hostilities would increase dramatically and the hostilities would extend throughout the Middle East- from Syria to the UAE, from Iran to Saudi Arabia, and so on.

In the event of hostilities against  Iran, it is more than likely that it would take Tehran from four to six months to developa nuclear weapon.Some experts are tendingto consider the situation around the Islamic Republic to be much more complicated than the Caribbean Crisis, saying the latter involved two partiesonly  and it was  much easier for them to seek a way out, while in the case of Iran, as already mentioned, the evident and non-evident key actors are many.

It is more than obvious that in the event of hostilities or war, it would be impossible to calculate all the scenarios, but one thing is clear: massive airstrikes against Iran would triggera large influx of refugees from that country. Most likely, Turkey would close its borders, and those flows would head north to the borders with Armenia and Azerbaijan.

This would pose a serious threat not only to Armenia and Azerbaijan but also to Russia. Some Russian military experts have already argued that Russia would have to increase and consolidate the number of its frontier troops on the Armenia-Iran border, take also control of Azerbaijan-Iran border, as well as the actual border between Nagorno-Karabakh and Iran.

In the event of such developments, it may be difficult for Azerbaijan to sit on different geopolitical chairs at the same time and official Baku would be more likely to allow  Russia to take control of its  border with Iran (including its exclave Nakhichevan) as the large flow of refugeeswould become a source of serious domestic political instability.

The hostilities against Iranwould produce no winners, neither military nor political. All would lose. But there is no doubt that Russia would get the biggest political dividends, and maybe China as well. Possible hostilities against Iran would greatly enhance Russia’s role and none other than Moscow could assume the part of a mediator. China might also show assistance to Moscow.

The Russia-Iran relations are already acquiring strategic allied qualities. As evidence,we can point out the recently signed agreement on expanded military cooperation between Iran and Russia. Iran is pursuing closer ties with the Russia-led Eurasian Economic Union (EEU). The sides are completing a set of procedures necessary for the entry into force of aninterim agreement establishing a free trade zone between Iran and the EEU, which is to begin operatingstaring October 27, 2019.

Given Turkey’s growing multilateral cooperation with Russia, it is safe to say that the Moscow-Ankara-Tehran triangle will become decisive, with Russia gaining significant influence in it. Thistrilateral cooperation may have a different meaning and impact, also in a variety of processes in a much larger region.

 Potential military action against Iran and the Nagorno-Karabakh conflict

Opportunities and potential scenarios ofhow interests and influences may change in the Middle East are a subject of constant discussions  in the context of Iran-related  developments, while the South Caucasus, where there are big conflict-generating  potential and  serious factors threatening  stability and security, and first of all, the Nagorno-Karabakh (NK)conflict, as a rule, is being ignored. The negotiation process under the auspices of the OSCE Minsk Group co-chairing countries – Russia, the United States and France –is now in a stalemate.

Given the bellicose, belligerent rhetoric, resumed after a pause by Azerbaijani president and some other top officials, as well as Armenian prime minister’s contradicting speeches along with his defense minister’s statements containing  aggressive elements, it is not ruled out that in the event of a possible large military action against  Iran,Azerbaijan may try to resort to hostilities in Nagorno-Karabakh presenting it as a justified response to contradicting and incomprehensive statements, even to the OSCE Minks Group co-chairs, coming from the current Armenian authorities, and their short-sighted policy.

 

It should be noted that significant changes have taken place in the NKconflict negotiation process under the auspices of the OSCE Minsk Group co-chairing countries. After the so-called ‘four-day war’ in 2016 April, thefocus in the discussions was placed exclusively on the ways to ease tensions and on the OSCE Minsk Group co-chairs proposals to maintain the ceasefire agreement, signed back on May 12, 1994.

They include the deployment of a larger OSCE monitoring group on the contact line, the installation of special electronic equipment to record ceasefire violations along the line of contact, and the creation of mechanisms for an international investigation of ceasefire breaches by the sides of the NKconflict. Azerbaijan has so far refused to accept these proposals of the OSCE Minsk Group co-chairing countries, ignoring the mediators’ calls.

After the change of power in Armenia in April-May 2018,these issues were pushed out from the negotiation agenda, and are no longer mentioned in the OSCE Minsk Group co-chairs’ official statements. By the way, starting in 2013 and until 2016, these proposals werepresented to the conflicting parties as a demand.

Instead, the focus in the discussions in the negotiation process shifted to the conflict settlement issues, which obviouslyis not promising, and that is why, as mentioned above, the negotiations have appeared in an uncertain, almost deadlocked situation.

Such a change in the agenda seems to satisfy Azerbaijan, and the current deadlock does not, to put it mildly, contribute to the maintenance of the ceasefire by the parties to the NKconflict, which, by the way, is their international obligation.

t should be noted that while earlier the mediators considered the conflict management, ceasefire and security maintenance to be their task, now after the famous ‘elevator’ verbal agreement reached between Pashinyan and Aliyev on September 28, 2018, in Dushanbe, to open a direct Armenian-Azerbaijani communication line,the ceasefire maintenance has shifted to the Pashinyan-Aliyev format.This change has been already stated in the OSCE Minsk Group co-chairs’ statements. These realities have significantly diminished the role of mediators in maintaining the ceasefire and restraining the rise of tensions.

Now it will be quite difficult, almost impossible in this situation to persuade Azerbaijan, or force it to return to the previous agenda, as the Azerbaijani authorities have got an opportunity to ignore the agenda that was not benefiting them.In case of an outbreak of hostilities in NK conflict, the active involvement of new political players, in the first place of Russiaand also the US, Turkey and Iran, would becomeinevitable.

Can OSCE Minsk Group co-chairing countries establish stability on the line of contact in the Nagorno-Karabakh conflict zone without the consent of parties of the conflict?

Azerbaijan has consistently opposed proposals to reduce the tension on the line of contact. The implementation of these measures can only be achieved with the consent of theparties of NKconflict. However, the OSCE Minsk Group co-chairing states have the opportunity to make the situation in the NKconflict zonemanageable and stable without the consentof the conflicting parties.

Given the fact that the OSCE Minsk Group co-chairing states – Russia, the United States and France – are permanent members of the UN Security Council, and are the most important geopolitical centers, all three technically are capable of establishing satellite control over the contact line, and as amatter of fact,they use this opportunity regularly to follow all the movements and changes on the line of contact in the NKconflict zone.

Consequently, these three mediating states can exercise political will and, without the consent of the parties to the conflict, come out with a joint official statementto say that they will exchange information regularly from satellite monitoring and will periodically discussand  analyze all the changes in the military situation in the conflict zone and possible undesirable developments.

The exchange of satellite monitoring information, discussions and analyses among the OSCE Minsk Group co-chairing states could serve as a serious deterrent to offensive plans of the sides to the conflict. Such a form of cooperation will substantially reduce the risk of resumption of large-scale hostilities and will become a strong positive impetus for furthering the NKpeace process.

At present, there are threats to global security in the region, and potential hostilities against Iran may spur a new war in Nagorno-Karabakh, and on the contrary, the outbreak of hostilities in NKconflict zone may trigger an escalation of the tension around Iran.In this context, the task of de-escalating and reducing the risk of new large-scale hostilities in the NKconflict zone is becoming more relevant for the wide regionMiddle East-South Caucasus.

Dr. David Shahnazaryan,

Ambassador Extraordinary and Plenipotentiary, Ambassador of the President of Armenia on Special Missions and Special Representative of the President of Armenia 1992-1995, the Head of the National Security 1994-1995, former two-term deputy in the Armenian parliament from 1991-1995 and 1995-1999.

India’s Civilisational Identity and the World Order

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India’s Civilisational Identity and the World Order

 

Author: Zorawar Daulet Singh

As the neo-liberal world order declines, non-Western powers are uniquely equipped to manage the power transition and contestations over the basic tenets of the emerging system. India’s civilisational ethos of reconciling different ideas will be of immense value in navigating the uncertainty and turmoil at a critical juncture of world history.

Many in India bewail the decline of the so-called liberal world order. Yet, few ask whether India was even a part of that order or actually shared all the norms and values that underpinned it. As a consequence, much of the debate dwells on the assertion that, as a liberal democracy, India’s foreign policy and geopolitical choices must logically follow suit. In practice, this meant that India would share the burden of democracy promotion elsewhere in the world as well as join a camp of other democracies. Yet, that has not occurred as I have discussed previously (Singh 2018). But, for most, India’s choices are seen as pragmatic rather than as a result of a civilisational tradition.

Different from Liberal West

On the surface, India would seem like the ideal candidate for membership in a coalition of democracies. The Indian Constitution, along with a largely uninterrupted period of liberal democratic practice, has laid a normative framework that has been difficult to challenge by any serious political force. On human rights, freedom of speech, equality of opportunity, private property rights, political participation and peaceful transfer of power between competing parties or groups, and rule of law and access to justice, India is very much part of a liberal political tradition.

Yet, when India interacts with the world, other values and beliefs also come into play. This is because Indian thought is constituted by a variety of ideas, and being a liberal democracy is merely one of those identities. The Indian world view is a hybrid one, shaped by a combination of liberalism, a belief in a plural multi-civilisational world order, a unique colonial experience and postcolonial identity, an aspiration for regional leadership with a corresponding geopolitical identity, and Westphalian values of sovereignty and non-interference. Collectively, these have created a distinct world view and a prism through which India perceives and interacts with the world.

The Western tradition could not be more different. As American historian Eric McKittrick put it in the 1950s,

With nothing to push against it, [liberalism]1 thinks in absolutes; the occasional shadows which cross its path quickly lengthen into monsters; every enemy is painted in satanic terms, and it has no idea how it would behave if the enemy were either bigger or different. (Desch 2008: 10)

One study found that, between 1871 and 1965, “Liberal states waged 65 percent of non-major power wars (which almost always are against weaker states).” Another study found a similar pattern, with “Liberal states starting 100 percent of these wars of choice” (Desch 2008: 16). Extending this pattern to the last three decades would reveal a similar conclusion. There was, and still is, an ideological hubris and an ambition to change opposing systems in the Western mind. None of these facets are part of the Indian psyche and world view, and this makes superimposing concepts such as democracy promotion highly problematic in India’s case.

So, what makes India different? India’s social and political journey has been a process of competition, compromise, and adjustment between different ideas. The constitutional commitment to internal diversity and pluralism has shaped the outlook towards international politics too. Coexistence with ethnic, religious, and ideological diversity at home has often meant coexistence with alternative systems abroad. There is an innate illiberalism in American liberalism that does not prevail in Indian culture, which by historical tradition and experience is not so easily threatened or overwhelmed by rival “others.”

The introduction of civilisational values transforms this conversation. The biggest difference between India and the West is that the Western mind assigns little value to nationalism, culture, and civilisation. These are usually seen as anachronisms and obstacles in the path of homogenisation of political communities. Civilisation is seen as regressive and antithetical to the order and modernity that democracy and neo-liberalism are intended to bring. But, for India, it is a core value that enables rather than hinders its domestic order, social stability, and development.

 

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If we are going to address the puzzle of why India’s domestic system as a democracy does not impact its outlook and behaviour towards other states and the world order in general, we must also ask: What impact does India’s longer civilisational history and culture have on its foreign policy? This question needs to be addressed seriously. There might be a strong case to be made that India’s civilisational history allows for a more complex relationship and interplay with rival ideologies and moral frameworks. The prolonged ability to negotiate differences and handle ambiguities conditions Indian political and cultural thought as well as its international relations. It was on this basic foundation that other values and norms have been absorbed into Indian thinking; specifically, the Westphalian concept of sovereignty and India’s unique colonial experience that fostered and further strengthened nationalism and created a distinct geopolitical identity for India.

One key distinction between India and Western approaches is that the latter promote democracy by providing moral, diplomatic, and financial support to individuals and organisations that are openly resisting or challenging the political status quo in a state. India rarely enters into such interference that might defy the ruling regime and undermine the sovereignty of a state. India works with the legitimate government of the day to offer different types of assistance. India’s interventions are in concert with the recipient—to strengthen the recipient state and its people—while the Western approach is fundamentally one of changing the target state and its institutions in concert with a section of the polity. It is about creating or exploiting a divide between the state and the people.

This difference in approaches can only be explained by the absence of a historical determinism in Indian strategic and philosophical thought, which, unlike Western liberal or radical Marxist ideas, has never had a proselytising historical tradition nor an ideological vision of the world that insists on universality as a necessary prerequisite for a world order and geopolitical cooperation. It is no accident that India’s democracy has managed to survive in a region with diverse regimes and political systems. It is also instructive that India was among the first to embrace non-alignment and carve out its own path when confronted with rival ideologies, neither of which were entirely appealing to India’s identity, culture, and ethos. Prime Minister Narendra Modi’s multi-alignment is another version of that same philosophy, that India can find common ground and derive stable and mutually beneficial ties with a variety of different civilisational states and political systems.

Changing World Order

For the past decade, it is increasingly clear that the neo-liberal order, or at least the dominant variant of it that we had become familiar with, along with some of its institutions are losing their effectiveness to supply public goods and govern a more complex globalised system. The demands and range of interests of the global South and non-Western world will not only require major reforms of these institutions, but more likely the establishment of new institutions to fill the governance void. The process has already begun. It is also clear that India will be at the forefront of collaboration with other rising powers and some of the traditional great powers in experimenting with new regional institutions and norms to supply public goods and order around Asia.

Only when there is clarity about the type of world we would like to see emerge can we put forward ideas or concepts and practise them in our foreign policy. Do we seek a multipolar polycentric world order where different civilisational states are going to manage the international system in a less hierarchical way, which is another way of saying the democratising of international relations? This is the dominant voice of India. If the central strategic task is transitioning from a unipolar neo-liberal world order for the privileged few to a multipolar interdependent world order with many civilisational states as members of such an open and inclusive international community, then we need a reformed vision to accommodate the diversity and pre-empt the chaos that could ensue from the power transition that is already under way. And, there is no automatic correlation between regime types and this reformed world order.

This is not an abstract insight. All we have to do is look at India’s foreign policy during the phase when its identity as a democracy was at its peak: the post-2000 era. This is the period of deep engagement with the United States and its allies. And yet, when it came to ideas on world order, international security, global governance, reforming the Bretton Woods institutions, etc, India formed partnerships with a variety of rising or re-emerging powers and civilisations, often with different political systems that were unsatisfied with the prevailing order and the position of these states within that order. Over the past decade, this trend has become even stronger: BRICS (Brazil, Russia, India, China and South Africa), Asian Infrastructure Investment Bank (AIIB), and Shanghai Cooperation Organisation (SCO) are all manifestations of this. These international and regional networks or institutions have been established not because its members are ordered in identical ways internally, but because many of these states had similar ideas of world order, and it made sense to collaborate in transitioning the world towards those images.

The good news is that the basic framework of a liberal international order (as distinct from the ascendance and decline of neo-liberal ideology over the past few decades) is already extensive in its ability to assimilate diverse rising powers with different political systems. The challenge is renewing that basic structure of an open and rule-based system, while making the necessary adjustments to expand the institutional and normative capacity to accommodate a larger swathe of the non-Western world. As Ikenberry (2011: 65) correctly points out, “The world is not rejecting openness and markets; it is asking for a more expansive notion of stability and economic security.” It is neo-liberalism as a global ordering concept that has unravelled and been discredited in the past decade, not just because it failed to address the problem of growth and sustainable development, but also because it sought to negate the self-images of several resurging non-Western civilisations. But, an open global economic order with rules to guide interdependence is still very much a worldwide demand.

The alternatives to an open world order—spheres of influence, closed regional blocs, neocolonial mercantilist networks, or, in essence, a fragmented order—are not appealing to rising powers because they seek wider regional and global access. Having benefited from global interdependence, they want that basic normative framework of an open system to survive. Indeed, one of the deep ironies of contemporary international relations is that rising powers, such as India, China and others, have today become the vanguards or champions for a reformed rule-based economic order that can enable their domestic transformations to continue, while the established liberal great powers have become revisionist and conservative in their orientation.

indiappppppp.pngFinally, a word of caution: India has to be extremely careful about uncritically lapping up the “democracy promotion” discourse, which is often aimed at polarising Asia and the world, and denying many states the flexibility of pursuing more complex foreign policies and balance of power strategies (Singh 2018). In the 1950s, Jawaharlal Nehru went to the extent of instructing his diplomats to avoid phrases such as the “free world,” “iron curtain,” or any politically-charged binary that could let it appear that India was parroting Western Cold War rhetoric that potentially positioned it at a disadvantage vis-à-vis other major powers. Modi’s June 2018 speech at the Shangri- La Dialogue in Singapore echoed this approach (MEA 2018). Rejecting the idea that India has a singular identity that then must automatically place it in one coalition or bloc, the Prime Minister spoke of a multitude of groups and partners where the common link was not democracy or shared domestic political systems, but converging material interests or shared ideas and norms of the world order or overlapping concepts of security.

Again, what allows for such multi-directional interactions and plurality in India’s foreign policy is a civilisational conception of the world order as an open and inclusive community of states. Such a philosophy is anathema for liberal absolutism and its drive for universality, which shapes much of the tragedy of Western geopolitics.

Source: https://www.vision-gt.eu

Brexit. Finissons-en !

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Brexit. Finissons-en !

par Michel Carlier
Ex: http://www.ieri.be

Le pénible feuilleton du Brexit commence à devenir lassant. Plus personne n’y comprend rien ! Et pour cause. Le désamour entre le continent et le Royaume-Uni ne date pas d’hier. C’est une longue histoire qui remonte à près d’un demi-siècle, époque de De Gaulle à Paris et de MacMillan à Londres. Je ne reviendrai pas là-dessus. En 1973, le Royaume-Uni, le Danemark et l’Irlande entrent dans le Marché commun européen où ils rejoignent les Six États fondateurs, les trois du Benelux, la République fédérale d’Allemagne, la France et l’Italie signataires du traité de Rome du 25 mars 1957. Deux ans plus tard, je suis à Madrid, en ma qualité de diplomate belge. L’ambassadeur d’Irlande en Espagne que je connaissais bien me dit un jour : « Les Six ont commis une lourde erreur en laissant entrer les Britanniques dans le marché commun. Vous verrez, ils sont entrés non par pour construire l’Europe, mais pour la détruire ». J’étais stupéfait de ce propos que je jugeais excessif. À l’époque, il est vrai, les continentaux - en particulier ceux du Benelux - vivaient dans l’euphorie de l’entrée de trois États dans la communauté économique européenne (CEE). Un premier élargissement qui démontrait que ce qui avait été créé par le traité de Rome était devenu une réalité attractive à laquelle les peuples - y compris celui des îles britanniques jaloux de son identité et fier d’avoir bâti un empire mondial - adhéraient spontanément. C’était le temps de l’enthousiasme et des grandes envolées lyriques. Mais l’enchantement ou l’illusion n’ont guère duré. Ce furent les années Thatcher avec le fameux « I want my money back » et celles qui suivirent avec les vetos britanniques aux candidats belges (Dehaene en 1994 et Verhofstadt en 2004) au poste de président de la commission européenne. Le premier se présentait à la succession de Jacques Delors et fut écarté à Corfou par le veto britannique de John Major et le second à celle de Romano Prodi. Cette fois, Verhofstadt se heurta au veto du premier ministre britannique Tony Blair.

Tout au long des décennies que nous venons de vivre avec les Britanniques dans notre communauté économique européenne devenue Union européenne (UE) en 1993, les gouvernements de Londres ont tous pratiqué la politique de l’ubiquité : un pied dedans et l’autre dehors. Ceci, après avoir signé tous les traités. Dont ceux de Maastricht (7/2/1992) et de Lisbonne (13/12/2007). Mais, de toute évidence, dans les îles, le cœur n’y était pas. Au chœur des continentaux qui chantait les louanges du fédéralisme européen, les dirigeants britanniques - tous partis confondus - répondaient en brandissant les vertus de la souveraineté territoriale et financière et en dénonçant la perversion, évidente à leurs yeux, des Continentaux qui leur faisaient face et ne cédaient pas à la tentation du grand large. En 2003, ce divorce évident éclata au grand jour lors de l’invasion de l’Irak décidée par G.W Bush et Tony Blair, contre l’avis d’États membres comme la France, l’Allemagne ou la Belgique. Et puis, comme d’habitude, on a remis un semblant d’ordre à force de compromis boiteux, jusqu’à ce que le référendum du 23 juin 2016 livre son verdict inattendu : 51,9 % des électeurs en faveur d’un retrait du Royaume-Uni de l’UE. Ce n’était que la suite logique de tant d’années de présence-absence au sein d’une Union poursuivant des objectifs diamétralement opposés à ceux que l’on souhaitait à Westminster et au 10 Downing street. Depuis ce coup de tonnerre de juin 2016, on assiste à une pièce sans fin et sans but. Les députés des Communes offrent au monde un piteux spectacle et imposent aux Continentaux des choix impossibles. Alors, que peut-il se passer ? Ou bien, il n’y aura pas de Brexit. Chose qui me paraît probable vu l’incroyable imbroglio qui prévaut outre-manche, avec un parlement qui accumule les votes contradictoires et un gouvernement sans majorité. En fait, l’opacité dans laquelle on s’enfonce s’épaissit à vue d’œil. À tous égards, y compris sur la question de l’immigration que trop de gens préfèrent ne pas aborder, à tort. Sur le continent, on préfère ne pas se prononcer. Sauf pour affirmer que l’accord May-Barnier n’est pas négociable. Et pourtant, il faudra bien négocier avant la date du Brexit encore fixée au 31 octobre 2019.

Enfin, je crois que, dans l’intérêt de tous, il est plus que temps d’en finir avec cette affaire qui, depuis trois ans et demi, accapare les énergies et paralyse l’UE qui se trouve bloquée et incapable d’initiatives et de progrès. J’ajoute qu’il faut être attentif à un fait que beaucoup semblent vouloir ignorer. Dans l’hypothèse plausible d’un non Brexit, Londres ne se bornera pas à reprendre sa place autour de la table comme si rien ne s’était passé depuis le référendum de 2016. Les continentaux partisans du maintien du R-U doivent savoir que les gouvernants britanniques n’hésiteront pas à imposer leur vision sur l’avenir de l’Union. Et, ce projet sera à l’opposé de celui défendu par les Fédéralistes. Londres posera ses conditions. Parmi elles : le maintien des dérogations déjà accordées et l’assurance de l’abandon de tout projet institutionnel visant à accroître les compétences de la Commission et du parlement. Dans cette hypothèse, un coup d’arrêt définitif sera porté au grand rêve des Européens convaincus. Ce sera l’adieu à l’Europe puissance. En clair, les Fédéralistes européens n’ont guère le choix. S’ils persistent dans leur grand projet de construction européenne, ils ne peuvent plus se laisser freiner par ceux qui ne veulent pas de cette Europe unie et indépendante. À quelques semaines de la date fixée, il serait utile que nos dirigeants aient cela à l’esprit lors de leurs discutions avec Johnson et ses ministres. Et, puisque ceux-ci brandissent la menace d’une sortie sans accord, qui entraînerait - selon les Cassandre de service - un cataclysme épouvantable, il serait opportun, je crois, de ne pas s’en tenir à la posture du déni de négocier. L’avenir de l’UE est une affaire tellement sérieuse que ce serait criminel de le sacrifier sur l’autel du maintien en son sein et à tout prix d’un État qui ne partage pas, ou si peu, l’idée même de construction européenne.

S.E.M. Michel Carlier

Ambassadeur honoraire de S.M. le Roi des Belges

19 septembre 2019

NB. Le 24 septembre 2019, la Cour suprême du Royaume-Uni déclarait illégale la décision du gouvernement de Johnson de fermer durant 5 semaines le parlement de Westminster. Nouveau camouflet pour le Premier ministre dont les oppositions réclament aussitôt la démission. Réuni à nouveau dès le 25 septembre, le parlement persiste dans la cacophonie. Johnson résiste et met au défi ses adversaires de déposer une motion de censure. En outre, il renouvelle sa proposition d’organiser rapidement des élections anticipées.

lundi, 14 octobre 2019

Sur la géopolitique de l’incursion turque en Syrie

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Sur la géopolitique de l’incursion turque en Syrie

Auteur : Salman Rafi Sheikh

Ex: http://www.zejournal.mobi

En dépit du fait que la Turquie a récemment défié les États-Unis avec son achat du système de missiles russes S-400, le président US a finalement cédé à la demande de longue date de son partenaire de l’OTAN d’envahir le nord du pays et d’éliminer les milices kurdes. Il s’agit là d’une décision cruciale puisque les milices kurdes ont été les principaux alliés terrestres des États-Unis dans la guerre contre l’État Islamique en Syrie. Avec l’abandon par les États-Unis de leur seul allié terrestre en Syrie, un changement de politique est en cours, un changement qui pourrait finalement profiter à la Syrie. Même si nous y reviendrons plus tard, ce dont il convient de discuter ici, c’est du facteur qui a conduit les États-Unis à changer leur position d’antan vis-à-vis des Kurdes.

Le monde devient de plus en plus multipolaire, et le fait que la Turquie soit un « Empire du Milieu » entre deux pôles a tiré le meilleur parti de sa position géostratégique dans l’ordre mondial émergent. Comme Erdogan l’a dit dans son récent discours à l’ONU, « le monde est plus grand que cinq ». Il faisait référence aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité : Grande-Bretagne, France, Russie, Chine et État-Unis. Peut-être veut-il que son pays soit inclus comme sixième, ou que le monde a déjà trop changé pour que ces pays puissent se débrouiller seuls sans se soucier des intérêts des autres puissances.

Comme l’ont indiqué de nombreux reportages dans les grands médias occidentaux, la Turquie, malgré ses liens stratégiques très explicites avec la Russie, reste importante pour les États-Unis. Le fait que les États-Unis, bien qu’ils soient si profondément habitués à diriger le monde unilatéralement, aient dû changer leur position reflète la politique étrangère et les ajustements stratégiques nécessaires que même les États-Unis doivent faire dans ce monde de plus en plus multipolaire où un pays, relativement plus petit que les États-Unis et situé à l’intersection de l’Asie et de l’Europe, peut forcer un pays beaucoup plus grand et puissant à donner la priorité aux intérêts des petits pays.

Deux choses, en tant que telles, se distinguent. Premièrement, la Turquie n’est plus un partenaire étasunien souple et volontaire et/ou un ardent partisan du programme mort pendant la guerre froide d’endiguement de l’Union Soviétique, ou Russie et Chine de l’époque contemporaine, même si elle continue de fournir la base aérienne d’Incirlik, un aéroport militaire au sud-est de la Turquie, qui accueille cinquante armes nucléaires tactiques visant principalement à renforcer ce que les experts OTAN appellent une « garantie étendue » de leur organisation contre une invasion russe en Europe.

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La base aérienne d’Incirlik

Deuxièmement, les États-Unis, en raison de la forte présence de la Russie dans la région, ne sont plus un hégémon extérieur retranché dans la région, pratiquement plus en mesure d’imposer leurs politiques à leurs partenaires. Cela signifie que la Turquie est en bien meilleure position qu’il y a quelques années pour défendre ses intérêts de manière beaucoup plus indépendante. C’est peut-être la raison pour laquelle la Russie, tout en sachant que le territoire turc peut être utilisé contre la Russie dans tout conflit futur avec l’OTAN, développe toujours ses relations d’une manière jamais connue auparavant par les deux pays.

C’est quelque chose que les États-Unis ne peuvent pas contrôler. Tout ce qu’ils peuvent faire, c’est ajuster leur position pour protéger leurs intérêts à long terme. Leur décision de se tenir à l’écart de l’incursion turque à venir reflète cet ajustement.

D’autre part, la Russie et la Syrie sont également très présentes dans l’équation. Si la Syrie et la Russie peuvent s’opposer à une présence militaire à grande échelle de la Turquie en Syrie – et toutes deux réitéreront que cette présence n’est pas invitée et n’a aucun fondement légal -, cette objection ne deviendra pas une opposition pratique, car une incursion turque et le silence des États-Unis qui a suivi, ainsi que leur abandon des Kurdes pourraient rapprocher ces derniers de la Syrie et de la Russie.

Les responsables russes ont récemment parlé des « positions maximalistes » que les Kurdes ont adoptées dans leurs relations avec le gouvernement syrien. Par conséquent, une fois acculés par les Turcs et abandonnés par les États-Unis, ils pourraient se tourner vers le gouvernement syrien pour un arrangement. Cela donnera bien sûr à la Syrie et à la Russie l’occasion de réunifier l’ensemble de la Syrie, un objectif ultime auquel même la Turquie s’est montrée sensible.

Une récente déclaration du ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Çavu?o?lu, a indiqué qu’Ankara avait « soutenu l’intégrité territoriale de la Syrie depuis le début de la crise et continuera de le faire » et qu’en éliminant toutes les « forces terroristes » de cette région, la Turquie ne ferait que « contribuer à apporter sécurité, paix et stabilité à la Syrie ».

En outre, étant donné que la Russie envisage d’étendre sa coopération avec la Turquie au-delà de la Syrie, Moscou ne s’opposera pas à l’incursion turque et laissera Ankara lui échapper des mains. Dans le même temps, Moscou voudrait s’assurer qu’il n’y ait pas de combats à grande échelle, ce qui permettrait à des groupes comme l’État Islamique et Al-Qaïda de refaire surface et d’annuler les progrès que la Russie et la Syrie ont réalisés depuis deux ans ou deux ans.

Moscou fera donc son propre ajustement et préférera jouer un rôle de médiateur entre les Kurdes et les Turcs, et les Kurdes et Damas afin de consolider le contrôle syrien sur tous ses territoires.

Dans ces conditions, il est possible qu’un règlement émerge de la tempête que la Turquie s’apprête à déclencher. La médiation de Moscou pourrait être acceptable pour toutes les parties. Ankara, bien sûr, voudrait que Damas et Moscou garantissent aux Kurdes qu’ils sont confinés dans leurs zones traditionnelles et qu’ils ne s’engagent pas dans des activités militantes contre Ankara, ni n’incitent au séparatisme parmi les Kurdes vivant en Turquie.

Traduction Réseau International

OTAN versus OCS : un bras de fer feutré mais réel

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OTAN versus OCS : un bras de fer feutré mais réel

Auteur : Général Dominique Delawarde 

Ex: http://www.zejournal.mobi

C’est bien en réaction à la malheureuse campagne de l’OTAN dans l’ex-Yougoslavie que la Russie et la Chine, humiliées et impuissantes à l’époque, ont résolu de s’organiser pour tenter de s’opposer plus efficacement aux ingérences unilatérales de l’Alliance Atlantique qui pointaient leur nez. Leurs efforts conjoints ont abouti à la création, en 2001, de l’Organisation de Coopération de Shangaï (OCS). Au départ peu puissante, cette organisation a pris, petit à petit, du poids avec son élargissement et le développement économique très rapide de certains de ses membres, la Chine et l’Inde notamment. Cette montée en puissance de leur économie a permis à ces pays d’augmenter considérablement leurs budgets de défense et d’inscrire ces hausses dans la durée.

Au fil du temps, et bien qu’elle s’en défende, cette organisation est devenue clairement rivale et concurrente de celle de l’Atlantique Nord pour ce qui est de sa vision du monde. Cette opposition à « la coalition occidentale » s’est exprimée, dès 2005, par le rejet unanime de la candidature des USA qui ne demandaient, pourtant, qu’un strapontin d’observateur. Elle se manifeste aussi à l’ONU où l’Inde et la Chine se montrent solidaires de la Russie sur les crises syrienne et ukrainienne. Elle se mesure enfin dans la teneur des 18 déclarations communes cosignées par les chefs d’état de l’OCS. Ces documents viennent chaque année clôturer leur Congrès depuis 2001.

Aujourd’hui, l’OCS compte huit États membres à part entière, dont quatre puissances nucléaires, Russie, Chine, Inde, Pakistan, alors que l’OTAN n’en compte que trois. Elle compte aussi quatre pays observateurs dont l’Iran, depuis 14 ans, et six partenaires de discussion, dont la Turquie depuis 7 ans. Les huit membres à part entière regroupent, à eux seuls 43 % de la population de l’humanité, à comparer aux 11 % qui constituent la population des 28 pays membres de l’OTAN. En terme de population, le centre de gravité de la « communauté internationale » n’appartient donc pas à l’OTAN.

L’Alliance cherche à se rassurer en affichant le cumul des budgets de défense de ses 28 États membres en le comparant aux budgets des États membres de l’OCS, pris individuellement. Elle met aussi en avant les réelles divisions au sein de l’organisation concurrente pour ne pas avoir à évoquer les siennes. Elle souligne enfin le facteur d’efficacité présumé que constitue son organisation militaire intégrée en occultant le fait que les forces militaires des pays de l’OCS effectuent une douzaine de grandes manœuvres militaires bi ou multilatérales chaque année.

De lourdes erreurs d’appréciation sont manifestement commises, volontairement ou non, par ceux qui veulent à tout prix promouvoir la fiction d’une supériorité écrasante de l’OTAN, qui resterait, aujourd’hui et demain, la seule « super alliance » apte à régenter le monde.

La première de ces erreurs consiste à présenter des comparaisons de budgets de défense qui ne sont pas pertinentes puisqu’elles prennent comme unité de mesure le dollar nominal au lieu d’utiliser la parité de pouvoir d’achat (PPA). En effet, les membres de l’OCS payent bien leurs personnels militaires dans leur propre monnaie et n’achètent quasiment pas d’équipements à l’Ouest. Leurs budgets de défense ne peuvent donc être correctement évalués qu’en parité de pouvoir d’achat.

Sans entrer dans les détails, les budgets de défense cumulés des États membres de l’OTAN se montent, à environ, 1000 milliards de dollars en nominal et quasiment le même montant en parité de pouvoir d’achat (PPA), compte tenu du poids des USA et des trois poids lourds européens de l’Alliance, dont le niveau de vie est proche.

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Le tableau, ci-dessus, présente les budgets de défense des pays membres de l’OCS en $ nominal et en PPA.

Ce tableau fait apparaître une quasi-parité PPA entre l’OCS et l’OTAN (à 1000 milliards de $ PPA environ). Les leaders politiques et militaires occidentaux ne devraient pas négliger ce type de comparaison et, peut-être, devraient-ils commencer à s’inquiéter du rythme toujours très élevé de progression des budgets de défense dans le camp de l’OCS, notamment pour la Chine et pour l’Inde.

Notons que le budget de défense PPA de l’Iran, adversaire des USA, donc potentiellement de l’OTAN, est tout à fait « respectable ». Ceci pourrait expliquer d’ailleurs certaines percées technologiques qui ont surpris les observateurs et qui pourraient encore surprendre.

La deuxième erreur d’appréciation consiste à ne considérer que les budgets en oubliant de comparer la manière de les utiliser. Sur ce point, la comparaison OTAN-OCS est en défaveur des pays membres de l’OTAN. L’entretien des très nombreuses bases US établies sur l’ensemble de la planète et la politique d’ingérence des trois pays : États-Unis, Royaume-Uni, France, coûte très cher. Ces derniers, surtout les USA, y consomment une part considérable de leur budget de défense. Cela réduit d’autant la part consacrée au renouvellement des équipements et à leur maintenance. Ajoutons que la politique de dispersion, voire l’engagement de forces et de moyens sur l’ensemble de la planète n’est pas toujours un gage d’efficacité en termes militaires, lorsque vient le moment de s’engager rapidement sur un seul théâtre, bien localisé, et d’y concentrer son effort…

Pour les pays de l’OCS, ce type de « gaspillages » liés aux interventions et aux stationnements de forces hors de leurs frontières est minimal et la part consacrée à la mise en place de nouveaux équipements est maximale. Par ailleurs, il faut garder à l’esprit que l’ingérence et la course à l’hégémonie nécessitent la possession, la maintenance et l’emploi quasi-permanent de matériels « offensifs » très coûteux : porte-avions, aéronefs, missiles de croisière ultrasophistiqués qui ne sont, par ailleurs, plus invulnérables. A l’inverse, la posture plus « défensive » de l’OCS peut être très efficace à bien moindre coût : dispositifs anti-aériens, missiles antinavires, drones.

La troisième erreur des Occidentaux consiste à sous-estimer la rapidité de l’évolution de divers facteurs de puissance. La croissance économique (PIB) des pays membres de l’OCS, tirée par l’Inde et la Chine est, encore aujourd’hui, trois à quatre fois supérieure à celle des pays membres de l’OTAN, ce qui se traduit par de très fortes hausses annuelles des budgets de défense au sein de l’OCS depuis sa création, de 6% à 12% par an pour la Chine et pour l’Inde. Ces hausses se poursuivent aujourd’hui au sein de l’OCS, alors que presque tous les Etats membres de l’OTAN ont connu des budgets en forte régression, puis en stagnation, depuis la fin de la guerre froide.

La quatrième erreur d’appréciation de l’Alliance Atlantique est de sous-estimer les réactions de rejet et le niveau des inimitiés, voire de haine, que leurs interventions suscitent. Ces réactions de rejet concernent les pays victimes des ingérences US/OTAN, les alliés et amis de ces pays victimes, et une part croissante des opinions publiques occidentales. Elles constituent des facteurs d’affaiblissement de l’OTAN et de renforcement de la détermination et de l’unité du camp qui s’y oppose.

La cinquième erreur d’appréciation des stratèges occidentaux est de considérer que les pays dans le camp de l’OCS sont trop profondément divisés et manquent de cohésion pour constituer une réelle opposition (Chine-Inde, Inde-Pakistan). C’est oublier que ces Etats ont, jusqu’à présent, fait primer leurs objectifs communs sur leurs disputes bilatérales, si aiguës soient ces dernières.

En effet, dans le cadre des congrès annuels, des réunions préparatoires à ces congrès et des autres grands rendez-vous : sommet des BRICS, G20, commémorations de fêtes nationales, rencontres bilatérales, les chefs d’Etats et leurs ministres rencontrent plusieurs fois par an leurs homologues des autres Etats membres de l’OCS, et ils se parlent. Compte tenu de leur longévité au pouvoir, ces leaders politiques se connaissent parfaitement. Ils cosignent de nombreuses déclarations communes et votent souvent ensemble, contre les projets de résolutions présentés par les Occidentaux à l’ONU. Ils multiplient les manœuvres militaires bi ou multilatérales et achètent leurs armements à l’Est plutôt qu’à l’Ouest.

Enfin, dès qu’elle le souhaitera, l’OCS n’aura aucun mal à s’élargir. Les candidats potentiels ne manquent pas. L’Iran et la Turquie, pour ne citer que ces deux Etats, pourraient d’ailleurs y être admis à court ou moyen terme. Si l’OCS ralentit volontairement son élargissement, c’est probablement pour ne pas alarmer inutilement l’Occident et gagner les quelques années nécessaires pour assurer, puis consolider sa suprématie sur les deux volets économique et militaire.

Lorsqu’on veut comparer l’OTAN à l’OCS, il y a, bien sûr, d’autres erreurs d’appréciation à éviter, concernant notamment les aspects quantitatifs et qualitatifs des effectifs militaires, de l’entraînement, des matériels majeurs, des réserves, de la disponibilité opérationnelle des unités et des équipements, des forces morales, et des systèmes de gouvernance des Etats membres. Ces comparaisons surestiment trop souvent nos capacités et sous-estiment celle d’une organisation qui pourrait bien être, en tout ou partie, notre adversaire de demain. L’étude du très sérieux institut Thomas More du 30 mai 2017, montre à quel point la composante UE de l’OTAN est devenue, au fil du temps, une addition de faiblesses (1). Sans doute l’UE a-t-elle trop engrangé les dividendes de la paix depuis 1991 pour en arriver là.

Dans un tel contexte, chacun sent, chacun sait que le centre de gravité de la puissance économique et militaire bascule assez rapidement des pays membres de l’OTAN, vers ceux de l’OCS. Ne serait-il pas prudent et clairvoyant pour la France d’adopter une politique étrangère au moins plus équilibrée entre l’Est et l’Ouest (politique gaullienne) ? Une politique plus ouverte à l’Est afin de ne pas s’enfermer dans une liaison transatlantique exclusive, c’est à dire dans le camp des perdants probables de demain. Le travail des politiques consiste à comprendre le monde et à anticiper et non pas à réagir avec retard aux événements et à faire subir à leur pays les préjudices découlant de leur imprévoyance ou de leurs erreurs d’analyse.

Il est néanmoins vrai que, jusqu’à présent, l’OTAN a toujours pris la précaution de ne s’engager militairement que du « fort au faible » (Serbie, Libye). Mais hélas, les élites néoconservatrices US et européennes tiennent, aujourd’hui, le haut du pavé tant à Washington que dans les plus hautes instances de l’OTAN. Ces élites ne manquent jamais de projets bellicistes pour tenter d’assurer l’hégémonie US sur le « reste du monde ». A ce titre, les propos du général US Westley Clark, ancien commandant en chef de l’OTAN sont édififiants (2).

Espérons que ces élites ne commettront pas, demain, l’erreur de surestimer la force de leur camp et de sous-estimer celle de leur adversaire potentiel. Pour preuve, la détermination des Houthis qui tiennent en échec depuis cinq ans les corps expéditionnaires à hauts budgets de la coalition saoudienne pourtant assistés par le trio Etats-Unis, Royaume-Uni, France. Il y a peut-être des leçons à tirer. ….

Espérons enfin que ces mêmes élites ne lanceront pas l’Alliance atlantique, et la France avec elle, dans des aventures qui pourraient bien s’avérer au-dessus de leurs forces et avoir des conséquences apocalyptiques pour elles comme pour le monde.

Notes:

(1) https://www.iveris.eu/list/notes_danalyse/264-europe_de_la_defense_et_capacites_militaires

(2) https://www.youtube.com/watch?v=vE4DgsCqP8U


- Source : Iveris

samedi, 12 octobre 2019

Robert Steuckers - L'Europe, une multitude de défis!

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Robert Steuckers - L'Europe, une multitude de défis!
 
 
Conférence en trois parties organisée par Résistance Helvétique en mars 2019.
 

vendredi, 11 octobre 2019

Table ronde: ”La Syrie en flammes”

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3ème Forum de Chisinau:

21 septembre 2019

Table ronde: ”La Syrie en flammes”

 
 
 
Table ronde ”La Syrie en flammes”
 

Dans l’insécurité mondiale actuelle, la guerre par accident devient une menace réelle

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Chisinau Forum III:

David Shahnazaryan

Dans l’insécurité mondiale actuelle, la guerre par accident devient une menace réelle

(+ VIDEO in English)

 

David Shahnazaryan, ancien chef des services secrets, ancien ambassadeur, militant politique et civique (Arménie)

Tout d’abord, je tiens à remercier chaleureusement les organisateurs de cet événement pour nous avoir donné l’occasion de participer à ces discussions et d’y prendre la parole. Bien que je ne sois pas toujours d’accord avec ce qui a été dit ici, communiquer avec un public aussi brillant est certainement utile et agréable.

Il a été dit ici que l’anglais est la langue de l’empire. D’abord, comprenons ce qu’est l’empire. Les anciens empires géographiques ne sont plus pertinents aujourd’hui. À mon humble avis, un empire est un pays qui exporte de l’énergie – politique, économique, technologique et militaire. Si nous regardons la notion d’empire de ce point de vue, il y a trois empires dans le monde maintenant. Les États-Unis sont un empire politique, militaire, économique et technologique ; la Russie est un empire politique et militaire ; tandis que la Chine est un empire économique, technologique et politique. Il est évident que nous vivons maintenant dans un monde multipolaire.

Quant à la mondialisation, je tiens à souligner que je ne suis ni mondialiste ni antimondialiste. Je pense qu’il y a à la fois des aspects positifs et négatifs de la mondialisation. Actuellement, l’une des conséquences les plus dangereuses de la mondialisation est la mondialisation du danger, de la menace et de l’imprévisibilité. Aujourd’hui, pratiquement tous les pays d’Eurasie, et pas seulement, connaissent ce que nous appelons un manque de sécurité.

La raison principale en est que le système de sécurité internationale, le système de sécurité européen qui a été créé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le système de sécurité dit de Yalta et de Potsdam, a cessé de fonctionner depuis longtemps. Et jusqu’à présent, nous n’avons constaté aucune tendance sérieuse à la création d’un autre système qui pourrait le remplacer.

Aujourd’hui, nous vivons dans un monde où un ami de votre ami peut être votre ennemi, et un ami de votre ennemi peut aussi être votre ami. Nous vivons dans un monde extrêmement explosif.

Les orateurs précédents ont évoqué la situation en Iran. Je ne vais pas analyser la situation actuelle en Iran et dans les environs, mais je voudrais me concentrer sur un ensemble de préoccupations.

Je voudrais simplement présenter quelques considérations compte tenu de l’évolution dangereuse de la situation autour de la République islamique, alors que Washington et Téhéran restent enfermés dans l’impasse dans laquelle ils se trouvent, sans qu’aucune issue ne soit en vue.

Malgré certaines tendances et mesures positives récentes, qui ont réduit le risque d’une éventuelle action militaire contre l’Iran, la situation autour de la République islamique reste explosive. Les tentatives des États-Unis de former une nouvelle coalition de nations pour contrer ce qu’ils considèrent comme une nouvelle menace maritime de l’Iran, le déploiement de navires de guerre dans le golfe Persique, la saisie de pétroliers et la destruction de drones militaires ont créé une situation où les hostilités sont plus susceptibles d’être déclenchées par la prétendue « guerre par accident », que par une décision politique prise par l’une des principales parties concernées.

Étant donné le grand nombre d’acteurs et de parties prenantes clés dans ce processus, impliquant à la fois des acteurs publics et non publics, il n’est pas exclu que l’un des acteurs tente de provoquer une hostilité qui pourrait être présentée comme une « guerre par accident ».

Dans le pire des scénarios – si les hostilités et la guerre éclatent – il est évident que les opérations terrestres contre l’Iran sont pratiquement impossibles, tout d’abord à cause de la géographie – nous voulons parler des chaînes de montagnes le long de certaines de ses frontières, des déserts à l’est, des marais au sud et de la Turquie à l’ouest qui empêcheraient les troupes américaines d’utiliser ces terres pour envahir l’Iran.

 

Mais il est également évident que la géographie du théâtre d’opérations militaires s’étendrait considérablement dans toute la région. Les opérations militaires peuvent englober des pays qui seraient impliqués dans une guerre par inadvertance. En conséquence, le nombre de pays participant aux hostilités augmenterait considérablement et les hostilités s’étendraient à l’ensemble du Moyen-Orient – de la Syrie aux Émirats arabes unis, de l’Iran à l’Arabie saoudite, et ainsi de suite.

En cas d’hostilités contre l’Iran, il est plus que probable que Téhéran n’aura besoin que de quatre à six mois pour mettre au point une arme nucléaire. Certains experts ont tendance à considérer que la situation autour de la République islamique est beaucoup plus compliquée que celle de la crise des Caraïbes, affirmant que cette dernière n’a impliqué que deux parties et qu’il leur a été beaucoup plus facile de chercher une issue, alors que dans le cas de l’Iran, comme déjà mentionné, les acteurs clés évidents et non-évidents sont nombreux.

 

Il est plus qu’évident qu’en cas d’hostilités ou de guerre, il serait impossible de calculer tous les scénarios, mais une chose est claire : des frappes aériennes massives contre l’Iran déclencheraient un afflux massif de réfugiés de ce pays. Il est fort probable que la Turquie fermera ses frontières et que ces flux se dirigeront vers le nord jusqu’aux frontières avec l’Arménie et l’Azerbaïdjan.

Cela constituerait une grave menace non seulement pour l’Arménie et l’Azerbaïdjan, mais aussi pour la Russie. Certains experts militaires russes ont déjà fait valoir que la Russie devrait augmenter et consolider le nombre de ses troupes frontalières à la frontière entre l’Arménie et l’Iran, prendre également le contrôle de la frontière entre l’Azerbaïdjan et l’Iran, ainsi que de la frontière actuelle entre le Nagorny-Karabakh (Haut-Karabakh) et l’Iran.

Dans l’éventualité d’une telle évolution, il pourrait être difficile pour l’Azerbaïdjan de siéger sur différents sièges géopolitiques en même temps et les autorités de Bakou seraient plus susceptibles de permettre à la Russie de prendre le contrôle de leur frontière avec l’Iran (y compris son exclave Nakhitchevan) comme le flux important de réfugiés deviendrait une source de grave instabilité politique intérieure.

Les hostilités contre l’Iran ne produiront aucun gagnant – ni militaire ni politique. Tout le monde perdrait. Mais il ne fait aucun doute que la Russie obtiendrait les plus gros dividendes politiques, et peut-être aussi la Chine. D’éventuelles hostilités contre l’Iran renforceraient considérablement le rôle de la Russie et nul autre que Moscou ne pourrait assumer le rôle de médiateur. La Chine pourrait également apporter son aide à Moscou.

Les relations russo-iraniennes ont déjà acquis des qualités stratégiques d’alliées. Pour preuve, nous pouvons citer l’accord récemment signé sur une coopération militaire élargie entre l’Iran et la Russie. L’Iran cherche à resserrer ses liens avec l’Union économique eurasienne (UEE) dirigée par la Russie. Les parties achèvent un ensemble de procédures nécessaires à l’entrée en vigueur d’un accord intérimaire établissant une zone de libre-échange entre l’Iran et l’UEE, qui doit entrer en vigueur le 27 octobre 2019.

Compte tenu de la coopération multilatérale croissante de la Turquie avec la Russie, on peut affirmer que le triangle Moscou-Ankara-Téhéran deviendra décisif et que la Russie y exercera une influence significative. Cette coopération trilatérale peut avoir une multitude de significations et d’impacts, y compris dans divers processus et dans une région beaucoup plus vaste.

Pour en revenir aux manifestations négatives de la mondialisation, il y a une préoccupation que j’aimerais partager avec vous – c’est la mondialisation croissante de nouvelles valeurs. Dans mon pays, l’Arménie, en particulier, des processus sont en cours qui sont extrêmement dangereux pour notre État. Une organisation occidentale a une énorme influence sur le gouvernement arménien en place. Elle dirige un vaste réseau d’ONG qui affaiblissent notre État et elle protège ouvertement ceux qui commettent des actes terroristes. Permettez-moi de dire clairement de quelle organisation je parle – c’est l’Open Society Foundations ou la Fondation Soros, qui agit contre l’État arménien, contre le Haut-Karabakh, en cherchant à affaiblir nos forces armées.

Un attentat terroriste a été perpétré à Erevan contre un commissariat de police en juillet 2016 par un groupe terroriste, qui a pris des otages et tué trois policiers. Après le changement de pouvoir en 2018, les membres de ce groupe ont été non seulement acquittés, mais ont également créé un parti politique.

Ces problèmes sont d’une importance vitale pour l’Arménie : en effet, si la Géorgie est la Géorgie même sans l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud, si l’Ukraine est l’Ukraine même sans la Crimée, le Donbass et Lougansk, en revanche la République d’Arménie risque de perdre son statut d’État sans le Haut-Karabakh. Les activités de l’organisation susmentionnée visent principalement le Haut-Karabakh.

En fin de compte, je voudrais ajouter qu’il ne fait aucun doute qu’un nouveau système de sécurité internationale ne peut être créé que par la négociation. Aujourd’hui, à l’époque des guerres hybrides, la diplomatie semble avoir été repoussée au second plan.

Je pense qu’un nouveau système de sécurité internationale ne pourrait être créé que grâce à la coopération de la Russie, des États-Unis et de la Chine. Je pense que nous devrions tous, avec nos modestes moyens, promouvoir cette idée que le monde n’a d’autre choix que de créer un nouveau système de sécurité.

Merci beaucoup de votre attention.

lundi, 07 octobre 2019

Comment une superpuissance obsédée par les sanctions perd son statut

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Comment une superpuissance obsédée par les sanctions perd son statut

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com
 
Le président russe Vladimir Poutine a pris la parole hier à la réunion annuelle du Valdai Discussion Club à Sotchi. Une vidéo avec des traductions en anglais et des extraits de la transcription sont disponibles ici.

En ce qui concerne le système global, Poutine a fait une comparaison historique intéressante : Au XIXe siècle, ils se référaient habituellement à l'expression «concert des puissances». Le moment est venu de parler en termes de «concert» mondial de modèles de développement, d’intérêts, de cultures et de traditions où le son de chaque instrument est crucial, indispensable, essentiel et précieux, pour que la musique soit harmonieusement jouée, plutôt que dans une cacophonie de notes discordantes. Il est crucial de prendre en compte les opinions et les intérêts de tous les participants à la vie internationale. Permettez-moi de répéter que des relations véritablement mutuellement respectueuses, pragmatiques et, par conséquent, solides, ne peuvent être construites qu'entre États indépendants et souverains. La Russie est sincèrement attachée à cette approche et poursuit un agenda positif.

Le Concert de l’Europe était le système d’équilibre des pouvoirs entre 1815 et 1848, et de 1871 à 1914 : Une première phase du Concert de l'Europe, connue sous le nom de système du Congrès ou système de Vienne après le congrès de Vienne (1814-1815), était dominée par cinq grandes puissances européennes : la Prusse, la Russie, la Grande-Bretagne, la France et l'Autriche. [...] Avec les révolutions de 1848, le système de Vienne s’est effondré et, bien que les rébellions républicaines aient été maîtrisées, une époque de nationalisme a commencé et a culminé dans l'unification de l’Italie - par la Sardaigne - et de l’Allemagne - par la Prusse - en 1871. Le chancelier Otto von Bismarck a recréé le Concert de l'Europe pour éviter que de futurs conflits ne dégénèrent en de nouvelles guerres. Le concert revitalisé comprenait la France, la Grande-Bretagne, l'Autriche, la Russie et l'Italie, l'Allemagne étant la principale puissance continentale sur les plans économique et militaire.

Le Concert de Bismark a maintenu la paix pendant 43 ans, dans une Europe habituellement en guerre. Si Poutine veut être le nouveau Bismarck, je suis tout à fait d’accord.

Poutine a également fait une annonce plutôt extraordinaire :
Le président russe Vladimir Poutine a déclaré que Moscou aidait la Chine à mettre en place un système d'alerte contre les missiles balistiques. Depuis la guerre froide, seuls les États-Unis et la Russie disposent de tels systèmes, qui impliquent un ensemble de radars au sol et de satellites. Les systèmes permettent de détecter rapidement le lancement des missiles balistiques intercontinentaux. Lors d'une conférence sur les affaires internationales à Moscou jeudi, M. Poutine a déclaré que la Russie aidait la Chine à mettre en place un tel système. Il a ajouté que "c’est une chose très sérieuse qui améliorera radicalement la capacité de défense de la Chine". Sa déclaration a marqué un nouveau degré de coopération en matière de défense entre les deux anciens rivaux communistes qui ont développé des liens politiques et militaires de plus en plus étroits, tandis que Beijing et Washington ont sombré dans une guerre commerciale.

C’est aussi bon pour la Chine que pour la Russie. La Chine a immédiatement besoin d’un tel système car les États-Unis adoptent une attitude nettement plus belliqueuse à son égard.

Les États-Unis ont quitté le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire avec la Russie pour mettre en place une force de missiles nucléaires en Asie du Sud visant la Chine. Ils recherchent actuellement des pays asiatiques dans lesquels il pourrait installer de telles armes. La Chine utilise sa puissance économique pour empêcher cela, mais les États-Unis ont toutes les chances de réussir.

Alors que la Chine possède des armes performantes et peut se défendre contre une attaque de faible envergure, les États-Unis ont environ 20 fois plus d’ogives nucléaires que la Chine. Ils pourraient les utiliser dans une première frappe écrasante pour décapiter et détruire l’État chinois. Un système d’alerte rapide laissera à la Chine le temps de détecter une telle attaque et de lancer sa propre dissuasion nucléaire contre les États-Unis. Les systèmes d’alerte permettront donc de contrôler la capacité de première frappe des États-Unis.

Au cours des deux dernières années, la Russie et la Chine ont dévoilé des armes hypersoniques. À l’heure actuelle, les États-Unis ne disposent ni de telles armes ni d’un système de défense susceptible de les protéger.

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La Russie était suffisamment intelligente pour développer à la fois l’arme offensive hypersonique ultra-rapide et une défense contre elle. Via l’auteur Andrei Martyanov, nous apprenons qu’un communiqué de presse russe a été publié récemment : Traduction: Les équipes de combat du S-400, dans la région d’Astrakhan, ont organisé des exercices contre des missiles cibles hypersoniques "Favorit PM" et ont détruit toutes les cibles. La déclaration du service de presse du district militaire occidental a été annoncée. Les équipes des S-400 Triumphs provenaient des unités de défense aérienne de l'armée de l'air de Léningrad et de la défense aérienne du district militaire occidental. Et en quoi consiste ce complexe missile-cible "Favorit PM" ? Très simple, il s’agit d’une bonne vieille série de S-300 P profondément modernisée qui permet d’utiliser des missiles de type 5V55 dont les explosifs ont été retirés et qui sont capables de voler en manœuvrant à la vitesse de Mach 6, plus de 7 000 kmh. Ce sont de véritables armes antimissiles hyper-soniques et, évidemment, je n'ai aucune raison de douter de cela, le S-400 n'a eu que très peu de problèmes pour les abattre.

En plus du système d’alerte antimissiles, la Chine veut également avoir le système de défense aérienne et antimissile le plus performant. La Russie va faire une offre décente.

Le ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a parlé un jour plus tôt que Poutine. Son discours et les questions/réponses sont ici. La conversation portait principalement sur le Moyen-Orient et le ton de Lavrov était plutôt fâché lorsqu’il passa à travers une longue liste d’actions américaines malfaisantes dans la région et au-delà. Des remarques intéressantes ont également été faites sur la Turquie, la Syrie et l’Ukraine. Le passage le plus intéressant a été sa réponse à une question sur les sanctions américaines contre la Russie, que certains sénateurs souhaitent encore amplifier. Lavrov a dit : J'ai entendu dire que Marco Rubio et Ben Cardin sont deux membres du Congrès américain connus pour leur russophobie. Je ne pense pas que cela implique qu’ils ont la moindre capacité d'anticipation. Ceux qui ont une opinion politique plus ou moins réfléchie de la situation auraient dû se rendre compte depuis longtemps que les sanctions n'allaient pas dans le sens qu'ils souhaitaient. Je crois qu'elles ne fonctionneront jamais. Nous avons un territoire et des richesses qui nous ont été léguées par Dieu et nos ancêtres, nous avons un sentiment de dignité personnelle et nous avons également des forces armées. Cette combinaison nous rend très confiants. J'espère que le développement économique et tous les investissements réalisés et à venir porteront également leurs fruits dans un proche avenir.

Les États-Unis adorent infliger des sanctions à gauche et à droite, et l’administration Trump en a augmenté l’usage. Mais les sanctions, surtout les sanctions unilatérales, ne fonctionnent pas. Les États-Unis ne l’ont pas reconnu car ils n’ont jamais cherché à savoir si ces sanctions remplissaient leurs objectifs. Un rapport récent du Government Accountability Office [GAO]a révélé : Les agences du Trésor, de l’État et du Commerce s’efforcent chacune d’évaluer les effets de sanctions spécifiques sur les cibles. [...] Cependant, les responsables des agences ont évoqué plusieurs difficultés pour évaluer l’efficacité des sanctions dans la réalisation des objectifs politiques plus larges des États-Unis, notamment l’isolement des effets des sanctions des autres facteurs ainsi que l’évolution des objectifs de la politique étrangère. Selon les responsables du Trésor, de l’État et du Commerce, leurs agences n’ont pas elles-mêmes procédé à de telles évaluations.

Les États-Unis sanctionnent et sanctionnent à tour de bras sans jamais vérifier si les sanctions donnent les résultats escomptés. Les efforts visant à sanctionner la Russie ont sûrement eu des conséquences inattendues. C’est la raison pour laquelle l’alliance entre la Chine et la Russie s’approfondit chaque jour. Les États-Unis ont le privilège exorbitant de disposer de leur propre monnaie utilisée comme réserve internationale. La sanction des transactions en dollars américains est la raison pour laquelle les États-Unis perdent maintenant le dollar : L'entreprise russe Rosneft, a choisi l’euro comme monnaie par défaut pour tous ses nouveaux contrats d’exportation, y compris pour le pétrole brut, les produits pétroliers, les produits pétrochimiques et le gaz de pétrole liquéfié, selon des documents d’appel d’offres. La mise à l'écart des dollars américains, qui a eu lieu en septembre selon les documents d’appel d’offres publiés sur le site Web de Rosneft, devrait réduire la vulnérabilité de l’entreprise contrôlée par l’État face à de nouvelles sanctions potentielles des États-Unis. Washington a menacé d'imposer des sanctions à Rosneft pour ses opérations au Venezuela, une décision qui, selon Rosneft, serait illégale.

L’Iran a pris des mesures comparables. Il vend maintenant du pétrole à la Chine et à l’Inde dans les deux monnaies locales. D’autres pays en tireront certainement des enseignements et commenceront également à utiliser d’autres devises pour leurs achats d’énergie. Au fur et à mesure que les transactions en dollars diminuent, ils commencent également à utiliser d’autres devises pour leurs réserves de change.

Mais les États-Unis ne perdent pas leur statut financier, ni celui de seule superpuissance à cause de ce que la Chine, la Russie ou l’Iran ont fait ou font. Ils le perdent parce qu’il ont commis trop d’erreurs.

Les États qui, comme la Russie, ont fait leurs devoirs domestiques en tireront profit.

Moon of Alabama

Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone

Le pire des Premiers ministres britanniques

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Le pire des Premiers ministres britanniques

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Le pire des Premiers ministres du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ne s’appelle pas Boris Johnson. Chef du gouvernement de Sa Gracieuse Majesté depuis le 24 juillet dernier, l’élu de la circonscription londonienne d’Uxbridge et South Ruislip se démène dans un Brexit qui n’en finit plus. Ce n’est pas non plus l’« accident industriel » Theresa May, ni le travailliste Gordon Brown. Ce n’est même pas le belliciste menteur patenté à la solde des États-Unis Tony Blair ! C’est encore moins le conservateur John Major, la sociopathe carabinée Margaret Thatcher ou le tueur de masse en série Winston Churchill. Non, le pire des Premiers ministres de l’histoire britannique récente ne peut être que David Cameron.

David Cameron restera dans la postérité comme le principal responsable du désordre politique en cours outre-Manche. Soucieux de faire taire définitivement l’aile conservatrice anti-européenne et de marginaliser le national-mondialiste Nigel Farage, il soumet par référendum aux électeurs une question alambiquée sur la construction européenne. La victoire du Brexit, le 23 juin 2016, le déstabilise tellement qu’il démissionne moins d’un mois plus tard de toutes ses fonctions, y compris de son mandat de député de Witney. Il venait de comprendre que sa manœuvre retorse se retournait contre lui. En désertant le champ de bataille, à savoir les négociations épineuses de la sortie du Royaume-Uni de l’Union dite européenne, David Cameron pensait entreprendre une courte « traversée du désert » avant de revenir au pouvoir en homme providentiel des Tories. Raté ! Son calcul machiavélique s’est révélé vain.

Mais la plus grave faute de Cameron n’est pourtant pas le référendum; elle est bien plus ancienne. Le conservateur Cameron dirigea le Royaume-Uni de mai 2010 à juillet 2016. Il a la particularité d’avoir conduit un gouvernement de coalition entre 2010 et 2015. En effet, aux législatives de 2010, malgré le scrutin majoritaire uninominal à un seul tour, aucune majorité ne se dégage à la Chambre des Communes, premier indice d’une profonde désaffection des peuples des Îles britanniques envers leur Establishment pourri. Afin de renvoyer les travaillistes dans l’opposition, Cameron s’allie aux centristes libéraux-démocrates de Nick Clegg, promu vice-Premier ministre. L’entente gouvernementale torylib-dem dura toute la législature en dépit des inévitables frictions et contentieux, ce qui reste exceptionnel pour l’histoire politique britannique. Cette longévité étonnante revient à une loi votée en 2011 sur la pression des lib-dem, le Fixed-term Parliaments Act. Ce texte retire au Premier ministre le pouvoir discrétionnaire de dissoudre la Chambre des Communes pour le confier à l’assemblée elle-même par un vote à la majorité qualifiée des deux tiers.

Par cette loi, les libéraux-démocrates jouirent cinq années durant de leurs sinécures ministérielles. Or, en donnant au législatif le droit de se dissoudre, on constate que Boris Johnson est maintenant l’otage de Westminster avec le risque accru que le régime parlementaire britannique devienne à terme un régime d’assemblée, c’est-à-dire un système dans lequel le législatif à l’instar de la Convention française en 1792 – 1795 et de l’actuelle Confédération helvétique – commande un exécutif servile et dépendant.

La dissolution doit revenir à l’exécutif, soit au président dans un cadre plébiscitaire, soit au Premier ministre en tant que chef de la majorité parlementaire, ou, à la rigueur, au peuple lui-même par la voie référendaire. Incapable de former un gouvernement majoritaire, l’Israélien Benyamin Netanyahou l’a bien compris puisqu’il a demandé et obtenu de la Knesset nouvellement élue de se dissoudre aussitôt.

Face à une Chambre des Communes incapable de trancher entre un Brexit avec accord, un Brexit sans accord ou l’organisation d’un nouveau référendum, Boris Johnson devient la victime du piège involontairement tendu, huit ans auparavant, par David Cameron. Pour des motifs bassement politiciens, le pire des Premiers ministres britanniques a transformé ses successeurs en larbins plus ou moins dociles d’une clique politicienne attachée à ses privilèges.

Georges Feltin-Tracol.

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 141, mise en ligne sur TV Libertés, le 30 septembre 2019.

vendredi, 04 octobre 2019

Quatre questions à H. C. Shin, politologue coréen

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Quatre questions à H. C. Shin, politologue coréen

Propos recueillis par Robert Steuckers

1) Monsieur H.C. Shin, vous êtes Coréen et vous vous intéressez à toute géopolitique anti-thalassocratique. Qu’entendez-vous par cela ?

Lorsque j’étais à l’université entre 1986 et 1992, période en laquelle j’ai aussi effectué mon service militaire, je me suis engagé dans le mouvement étudiant d’inspiration marxiste-léniniste. A cette époque, le régime au pouvoir en Corée du Sud était une dictature militaire sous la tutelle de l’Amérique. Nous pensions, en ce temps-là, qu’une démocratie de type occidental pouvait résoudre le problème du pays, du moins, comme je le pensais personnellement, pouvait constituer une alternative à cette dictature militaire qui avait une poigne de fer. Nous avons donc lutté contre elle jusqu’en juin 1987. Finalement, la démocratie nous est arrivée en cette même année. Cette nouvelle démocratie coréenne nous permettait d’élire directement le président. Avant 1987, nous avions un système d’élection indirecte.

Tout le monde s’est alors dit : « Oh, notre rêve est enfin devenu réalité, nous avons gagné le ticket d’entrée pour l’utopie démocratique. Mettons un terme à notre terne combat et prenons des vacances ! ».

Pourtant, ce changement en Corée du Sud n’était rien d’autre que le passage d’un pouvoir militaire dur à un pouvoir soft. Mais tout aussi total ! Pire : le pouvoir a été transmis aux oligarques de la sphère économique comme on a pu l’observer aussi en Russie avec des personnages comme Berezovski. Et, bien sûr, le planificateur ultime demeurait l’Etat profond, alliance entre l’Etat coréen, la CIA coréenne et l’élite ploutocratique, qui utilisait le terme « démocratie » dans le même sens que les Vénézuéliens parlent de « Punto fijo ». C’est-à-dire, le schéma habituel, avec deux énormes méga-partis jouant un jeu de ping-pong permanent. Rien ne fut résolu après la « démocratisation », exactement comme en Europe de l’Est pendant les années 1990. En fait, comme vous le savez sûrement, la « démocratisation » n’est pas la démocratie.

Nous avons donc dû évoluer au sein d’une démocratie-bidon. Il y avait deux choix principaux : le premier était le marxisme-léninisme, l’autre le « kim-il-sungisme », où Kim est une sorte de Tito coréen mettant en scène l’idéologie de la Corée du Nord, une sorte de post-stalinisme. Depuis cette époque-là, les groupes « révolutionnaires » sont partagés entre deux camps : il y a ensuite les réformistes, qui pratiquent de la petite ingénierie sociale entre les deux groupes, les groupes libéraux-libertaires radicaux, les groupes sociaux-démocrates qui s’appuient sur le « troisième voie » d’Anthony Giddens.

Après avoir obtenu mon diplôme universitaire en histoire, mes intérêts politiques sont passés à l’arrière-plan parce que j’avais à gagner ma croute et à faire du fric dans le goulag capitaliste. Il y eut aussi l’effondrement de l’Union Soviétique : pour les tenants de la religion marxiste-léniniste, comme moi à l’époque, cet effondrement au début des années 1990 m’a choqué au point de perdre mon « âme politique » ; je constatais que mon utopie s’était évanouie à jamais. C’était comme si le Vatican avait disparu pour un catholique sincère… ! Tous les croyants en la foi marxiste-léniniste se sont dispersés aux quatre vents et se sont cachés. Ils ne parlaient plus de politique. Ils cessaient de se rencontrer parce qu’ils ne voulaient pas partager leurs peines avec leurs camarades. Ils voulaient que leurs plaies guérissent loin de tout, dans leurs caves d’isolés. Cependant, mon esprit était toujours sur orbite, tournait toujours autour d’une « matrice marxiste », sur l’idée d’une lutte des classes, même si j’avais quitté toute scène politique.

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J’ai passé quelque vingt années sans jamais faire de politique ; je ne fis que travailler, très prosaïquement, pour simplement survivre : j’étais devenu une âme vidée. Pendant cette longue période, j’ai observé l’attaque frontale des banksters de la finance globaliste contre les pays de l’Asie orientale, y compris contre la Corée du Sud en 1997. Cette attaque a été planifiée pour détruire les modèles de développement contrôlés par les Etats et qui pouvaient être, mutatis mutandis, comparés au modèle chinois. A l’époque, nous ne savions rien de tout cela. Les médias dominants, ici, en Corée, nous disaient : « Qu’est-ce que le FMI ? La Corée du Sud s’est effondrée financièrement, donc le FMI est venu pour nous sauver, comme un Messie descendu tout droit de la céleste Amérique ! Nous devions nous confondre en remerciements et demander à Dieu qu’il bénisse le FMI ! Même si nous devions quelque peu souffrir en acceptant ses mesures, nous devions nécessairement positiver les douleurs de l’austérité parce que nous avions été dans l’erreur ». Mon Dieu, comme nous avons été idiots, des moutons de Panurge! L’immense majorité des Coréens pensaient comme les médias leur disaient de penser. L’idée que nous souffrions de la nouvelle austérité parce que nous avions été soi-disant dans l’erreur me fait penser rétrospectivement à l’idée de « péché originel » dans la Genèse. Les gangs du FMI ont exploité l’économie coréenne de fond en comble. La Corée du Sud a été littéralement éviscérée. Le système de pillage, théorisé par le néolibéralisme, a été ancré dans notre pays.

En tant qu’ancien militant marxiste-léniniste, j’analysais la situation sur la base de concept aussi vague que celui d’ “impérialisme” ou j’essayais de la comprendre en utilisant les notions théorisées par Immanuel Wallerstein. Mais tout cela était trop théorique, en effet, et, derrière ces idées, en apparence justes, se profilait en fait la stratégie de tolérer des dissidences microscopiques, mise au point par les banksters de la finance globaliste. J’ai alors abandonné toute prétention à comprendre la situation dans son ensemble parce que je ne disposais plus d’armes théoriques valables. Rétrospectivement, je m’apercevais que l’économie politique de Marx et la théorie léniniste de l’impérialisme n’étaient pas exactes, tant et si bien qu’elles ne pouvaient pas expliquer la stratégie des cartels bancaires ou des dynasties de banquiers, issus d’une histoire longue où ils ont précédé le pouvoir thalassocratique depuis la mise en place de l’hégémonie de la City de Londres en Grande-Bretagne après deux « révolutions ».

Quoi qu’il en soit, j’ai commencé à douter du cadre théorique du marxisme et à entamer des recherches pour identifier la structure réelle de notre monde si étrange. J’ai quitté mon boulot et je me suis remis à étudier à partir de 2015. Je me suis inscrit en sociologie à l’Université Hallyim pour obtenir le grade de master. J’ai poursuivi ces études mais mes professeurs ne m’ont rien apporté. En fait, ils ne savent rien, eux non plus. Ils répètent des modèles scandinaves comme l’ « utopie temporelle » d’Ernst Wigfors ou les théories de Karl Polanyi ou de quelques autres. Ils évoquent des théories de l’Etat-Providence, mis en place dans un seul pays, exactement comme on parlait jadis de « socialisme dans un seul pays ». C’est tout. Ils se limitent essentiellement à de la méthodologie économique limitée et ignorent toute approche métapolitique. Ils installent une sorte de coupe-feu académique, à mon humble avis. En réalité, les divers épigones du marxisme, qu’il soit révolutionnaire ou réformiste, n’ont absolument aucune notion de géopolitique. Ils ne mettent l’accent que sur la révolte au sein même de la « société oppressante ». Bien sûr, à l’évidence, toute société capitaliste est oppressive, où qu’elle se trouve dans le monde. J’en tire la conclusion suivante : le marxisme n’est rien d’autre qu’une mutation maladroite et sécularisée du « frankisme sabbatéen », hérésie extrême du mysticisme juif dont le but est d’appeler le Messie en pratiquant à l’avance un messianisme activiste. Les tenants de ce sectarisme spécial disent : « Ecoutez, si nous commettons tous les crimes possibles et imaginables et brions tous les tabous, notre Messie descendra du Ciel pour assurer notre Rédemption et absoudre nos péchés. Donc il est nécessaire que nous les commettions, ces crimes, en trompant les gens, en les pillant et en les tuant… car ces comportements vont amorcer le processus de notre Rédemption ». Cela rappelle également la vision du monde des néo-conservateurs américains. Finalement, le marxisme a essayé de nous ôter nos précieuses identités traditionnelles. A la place de celles-ci, il a tenté désespérément d’installer une “identité de classe unique”, ce qui est à peine différent du libéralisme qui, lui, cherche à remplacer nos identités traditionnelles par des “identités individuelles” au nom de la liberté. Les deux systèmes sont donc des armes pour transformer l’être humain organique en cyborgs fous ou, mieux, en zombis modernes.

En plus, le marxisme ne développent aucune géopolitique. C’est une théorie-bidon de l’économie, une théorie non organique de la société : il semble avoir été conçu pour bloquer toute révolution réelle contre l’ennemi réel. Nous avons donc affaire, désormais, à des zombis marxistes-léninistes non payés qui sont englués dans un fanatisme qui ne se pose pas de questions, qui est égalitaire et horizontal, qui colle au prolétariat comme des sangsues à leur victime, parasitant les mouvements de travailleurs ou essayant tout bonnement d’améliorer leurs conditions de vie. Toutefois, cette stratégie de la « gestion étroite » a pour première priorité de se donner le monopole dans l’occupation du marché révolutionnaire. Leur mot d’ordre est : « Occuper le terrain politique des classes défavorisées car ainsi les vrais révolutionnaires ne pourront y accéder et les influencer ». Ils agissent de la sorte, au moment historique crucial où les oligarques de la ploutocratie globaliste peuvent les recruter comme mercenaires contre des mouvements populaires comme les gilets jaunes ou comme des fanatiques takfiri au Proche et au Moyen-Orient.

Face à cette situation, nous, les vrais révolutionnaires, nous devons élargir notre vision à l’échelle planétaire, en désignant les élites globalistes et cosmopolites et en démasquant leurs tactiques qui dépassent l’imagination de nos contemporains. En bref, nos ennemis agissent sur le globe tout entier et cherchent à réaliser leurs plans scélérats mais si nous organisons notre combat dans un seul pays, celui où nous vivons, ce serait commettre une effroyable stupidité. Le champ de bataille aujourd’hui est global. Voilà pourquoi nous devons étudier la géopolitique telle que vous la concevez, le néo-eurasisme tel que vous le défendez.

2) Vous allez créer un site sur l’Internet, qui explicitera vos idées. Quels sont vos objectifs en lançant cette activité ?

Mon objectif premier est de faire accéder lentement mais irrésistiblement le people coréen à la nouvelle approche, celle d’un nouvel ordre eurasien, si bien qu’il perde l’épiderme artificiel de l’homo americanus qui lui colle au corps.

Le second objectif est d’éduquer la jeune génération et de tirer d’elle une équipe de journalistes professionnels qui agiront en faveur d’un ordre eurasien émergent. Je prépare actuellement un curriculum incluant la géopolitique, l’ingénierie sociale, le système financier dans l’actuel royaume de Mammon, l’histoire de la thalassocratie, soit les six piliers sur lesquels reposent les temps modernes occidentaux en tant qu’âge sombre (figure 1) ; je travaille également à faire émerger une alternative traditionnelle coréenne aux idéologies occidentales modernes, avec, par exemple, l’idée d’un « bénéfice pour toute l’humanité » qui est l’idéal national promu lors de la fondation de la première dynastie de la vieille Corée continentale 고조선(古朝鮮. Gojoseon).

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[Figure 1] Les six éléments des “sombres temps modernes occidentaux”


3) Comment décririez-vous la situation politique et sociale en Corée du Sud aujourd’hui ?

La Corée a été occupée et divisée depuis 1945, exactement comme l’Europe. Le sort de l’Europe est très semblable à celui de la Corée. La Corée doit être réunifiée tout comme l’Europe, elle aussi, doit être réunifiée selon les principes d’un Reich, d’un Saint-Empire, reposant sur la souveraineté, la tradition et la diversité. Une Europe, une Corée ! Pas d’Union Européenne qui n’est qu’une Europe-bidon ! Pas deux Corées-bidon !

4) Vous avez découvert mon livre en langue anglaise et même ma trilogie en français: comment cela a-t-il été possible, alors que je suis un parfait inconnu en Corée?

Un jour, mon amie Somine m’a envoyé un livre The European Enterprise – Geopolitical Essays. Je l’ai lu. Avant de le lire toutefois, j’avais lu un grand nombre d’articles en anglais sur les thématiques du Moyen-Orient pour écrire ma thèse de master, dont le titre est “Le printemps arabe à la lumière de l’hégémonie ». Après avoir terminé la rédaction de cette thèse, je me suis mis à la recherche d’une théorie générale de la géopolitique. Bien sûr, je connaissais déjà plusieurs théories sur les relations internationals, tells celles de H. J. Morgenthau et de Kenneth Waltz, etc. Mais, pour moi, elles ne valent pas grand’chose. Personne n’explique la géopolitique de manière systématique. J’ai trouvé la voie à suivre dans votre livre. J’ai conclu que le monde actuel est animé par une lutte de 1 contre 4 à l’échelle globale (figure 2). Vous m’avez donné l’inspiration.

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[Figure 2] Une lutte à mort à l’échelle international (1 contre 4).

Dans notre pays, l’intelligentsia autoproclamée est hostile au people. Si on juge la situation d’après les critères du réseau mafieux/académique globaliste, c’est un phénomène bien naturel. Il n’y a plus que des peuples domestiqués et castrés.

Fondamentalement, il n’y a plus de tradition théorique cohérente qui soit basée sur la réalité du peuple. Les intellectuels ne cherchent plus qu’à trouver des opportunités intéressantes pour gravir les échelons du succès social. Ce qui est important à savoir, c’est qu’ils sont cooptés par les trois pires idéologies tirées des « sombres temps modernes », dont 70% dans le néo-conservatisme néolibéral, système idéologique créé par le sionisme chrétien. La Corée du Sud est un « royaume chrétien » de première catégorie. Tous vont à l’église pour prier pour leur bonheur individuel non pour le bonheur de la communauté en tant que tout. Ces dévots veulent tout simplement éviter la mauvaise fortune que leur procure un mauvais système pour apparaître aux yeux de tous comme des êtres exceptionnels et élus, comme l’imaginent être les juifs. 20% des Coréens continuent à rêver à des solutions réformistes.

Je ne connais pas la langue française mais dans un future proche, je vous ferai traduire, notamment les trois volumes de votre trilogie Europa afin d’en faire les textes de référence pour un nouvel enseignement de la géopolitique. Vos ouvrages sont des livres à lire, impérativement, pour comprendre avec exactitude ce qu’est la véritable Europe.

Merci, M. H. C. Shin, de nous avoir accordé cet entretien.